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Pourquoi ne produit-on pas plus de subsistances ? Pourquoi produit-on si peu de coton et de laine ? Pourquoi ne fait-on pas plus d’habits ? Pourquoi n’extrait-on pas plus de houille ? Pourquoi ne bâtit-on pas plus de maisons ? Voici le moment de répondre à ces questions.

§ 5. — Pour tirer parti de ces arrangements, l’homme doit se conformer à cette loi de nature qui demande que consommateur et producteur aient place l’un auprès de l’autre. — Augmentation de l’approvisionnement de toutes les nécessités de la vie dans les pays qui obéissent à cette loi. La population exerce pression sur les subsistances dans les pays où elle est violée.

Plus le lieu de production est voisin de celui de consommation et plus il y a rapprochement entre les prix des denrées premières et des utilités achevées, moindre sera la part de temps et d’intelligence à donner aux travaux de négoce et de transport ; plus on en aura à donner pour développer les pouvoirs de la terre ; plus se développera l’habileté pour entretenir ces pouvoirs ; plus augmentera la rémunération du travail ; plus s’accroîtra infailliblement la tendance vers l’augmentation du pouvoir d’obtenir de suffisantes fournitures d’aliment, de vêtement, de combustible ; et aussi du pouvoir de commander l’usage des maisons, usines fermes et outillage de toute nature, enfin de tout ce dont on peut désirer l’usage.

Comme preuve à l’appui de ceci, nous n’avons qu’à considérer l’empire des Mores en Espagne, les Pays-Bas sous les ducs de Bourgogne, et de là au temps présent, la France actuelle et tous les pays qui, à son exemple, maintiennent la politique dont Colbert prit l’initiative. Dans tous, l’agriculture passe à l’état de science, et le rendement de la terre augmente, — les pouvoirs de l’homme se développent, — la circulation s’accélère, — la faculté augmente d’entretenir commerce au dedans et au dehors, — il se crée plus de centres locaux, — l’homme gagne en puissance et en liberté. Pour ajouter à la preuve, vous n’avez qu’à regarder l’Irlande, l’Inde, la Jamaïque, la Turquie et le Portugal, qui sont sur la trace anglaise, et qui toutes suivent une politique qui agrandit la distance entre le consommateur et le producteur, et qui a pour effets de faire déchoir l’agriculture, — d’épuiser le sol, — d’affaiblir l’intelligence humaine, de ralentir le mouvement sociétaire, — de centraliser le pouvoir, — de soumettre de plus en plus ceux dont le travail produit à la direction de ceux qui s’occupent de trafic et de transport. — Dans les premiers pays, la théorie de l’excès de population va perdant du terrain chaque jour. Dans les autres, nous trouvons « la population exerçant une pression constante sur ses subsistances, » et demandant l’aide de la famine et de la peste pour