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téshumaines a été limitée à la demande de la simple force musculaire la plus grossière pour le travail rural. L’usage d’un champ à n’importe quel prix de loyer d’un côté, ou mourir de faim de l’autre, ce fut le seul choix qu’il leur fut laissé. Rien d’étonnant que l’espoir ait fui, que l’éducation, les livres, les bibliothèques et tout ce qui s’applique au développement intellectuel ait disparu, — laissant à leur place l’insouciance et l’imprévoyance, qui, depuis, ont amené un si grand accroissement de population. La famine succédait à la famine, — une épidémie à une épidémie, et la population augmentait. La raison de tout cela se manifeste dans le grand fait : que l’homme réel avait disparu par degrés, et que l’homme purement animal se substituait à sa place[1].

« L’Irlandais tenancier d’un cottage, le pauvre diable famélique qui vit de pommes de terre et d’eau, — pour citer encore le voyageur anglais distingué qui nous a fourni de précédentes observations, — ne possède rien comme point de départ, ni en terre, ni en aucune autre nature de valeur. Il est, lui et toute sa classe, par suite du fonctionnement de la loi de primogéniture dans la société, pauvre ab initio, et toute l’épargne qui peut se réaliser dans sa condition inférieure, sur les conforts et les nécessités de la vie, va dans la poche de son propriétaire sons forme de rente et non dans la sienne comme épargnes de sa propre prévoyance et de sa sobriété. De plus, il se trouve placé dans une fausse position par les propriétaires irlandais, même si on la compare à la tenure-cottagère qui exista d’abord dans toute l’Écosse et qui existe encore aujourd’hui dans les comtés du nord. Celle-ci était généralement grevée d’une rente en nature, c’est-à-dire d’une part proportionnelle dans la récolte ou réglée sur le rendement moyen. Le paysan avait devant lui une donnée facile à compren-

  1. Désireux de prouver l’étonnante énergie de la tendance à procréer qui a toujours existé en Irlande, les avocats de la théorie Malthusienne ont répandu dans le monde des tableaux qui montrent une augmentation de plus de 40 % dans les trois années de 1785 à 1788 ; — le chiffre de 2.845.932, pour la première, devient 4.640.000 dans la dernière. Cette dernière année peut approcher de l’exactitude ; et si on admet son chiffre, le doublement suivant aura demandé environ un demi-siècle. Cependant ce n’est que dans le présent siècle que nous avons des documents dignes de foi. — Le premier recensement date de 1813, et donne environ 6.000.000 d’âmes pour la population totale. Vingt-huit ans après, en 1841, nous avons le chiffre de 8.175.794. — L’augmentation dans cette période a été d’environ 35 %. »
      Voy. précéd. vol I. p. 338.