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demandes directes et déterminées aux demandes indirectes et incertaines jusqu’alors en usage[1].

Regardons sur n’importe quel point du globe, chez les nations en progrès nous trouvons abaissement de la proportion dans les produits de la terre et du travail exigée pour l’entretien du gouvernement, accompagné d’un accroissement de tendance à faire un honorable appel à des hommes raisonnables pour le payement d’impôts abjects et à abandonner le système qui vise à leur filouter une large proportion dans les produits du travail.

§ 12. — Plus s’accélère la circulation, moins il y a pouvoir d’exercer intervention dans le commerce, au moyen de taxes indirectes, et plus il y a tendance à ce que s’améliore la condition de l’homme.

Plus la circulation s’accélère, plus forte est la tendance dans cette direction, — la valeur de la terre et de l’homme s’élevant en raison directe de la vitesse avec laquelle la consommation soit la production. Plus la circulation est lente, plus forte est la proportion prise par les gouvernements, — et plus forte est la tendance vers la taxation indirecte. — La première direction aboutit à l’homme, qu’Adam Smith a reconnu faire le sujet de la science sociale ; la seconde aboutit à l’esclave, le sujet dont il est traité par MM. Malthus et Ricardo, — requis, ainsi qu’il l’est, de donner à ses différents maîtres une quote-part constamment croissante dans une quantité constamment décroissante fournie par la terre.

  1. « Les paysans libres de la Russie ne forment qu’une classe peu nombreuse ; mais ils vivent en « hommes libres » et heureux sur leur propriété. Ils sont actifs, sobres, et, sans exception, sont à leur aise. Cela doit être, car il leur a fallu payer cher pour leur liberté ; et une fois libres et en possession d’un terrain à eux, l’énergie et l’industrie qu’ils avaient montrées, même à l’état de serfs, doublent par la joie de se sentir libres, et naturellement leurs gains doublent aussi. — La seconde classe, les paysans de la couronne sont plus à leur aise (en mettant de côté le sentiment de la liberté) que les paysans de l’Allemagne. Ils ont à fournir leur contingent de recrues ; mais c’est là leur seule charge matérielle. De plus, ils payent annuellement à la couronne une somme de cinq roubles (environ 4 shillings) par chaque tête mâle de la maison. Supposons que la famille compte huit travailleurs mâles (ce n’est pas peu pour une ferme) ce sera à payer environ trente-deux shillings. Et quelle est la ferme qui ait à employer le travail de huit hommes pendant toute l’année ? Dans quel pays de l’Europe civilisée la charge du paysan est-elle aussi modérée ? Combien plus pesantes celles qui pèsent sur le tenancier anglais, sur le paysan français, allemand, et surtout sur le paysan dans toute l’Autriche qui, souvent, doit donner pour les taxes les trois quarts de sa récolte. Si le paysan de la couronne a le bonheur de se trouver dans le voisinage d’une grande ville, sa prospérité dépasse celle des paysans d’Altenbourg que l’on dit être les plus riches de toute l’Allemagne. D’un autre côté il ne peut jamais acheter sa liberté. Jusqu’à présent, du moins, la loi de la couronne ne l’y a point autorisé. » Jermann. Tableaux de Saint-Pétersbourg, p. 23.