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altérés les premiers tend par conséquent à baisser, et que dans toute société qui progresse l’homme tend vers la richesse, la force, la liberté, et non, comme M. Ricardo nous le donne à croire, vers la pauvreté, la faiblesse et l’esclavage final ; que les faits de l’histoire sont d’accord avec cette dernière manière de voir, et que la théorie de M. Ricardo sur la marche de l’exploitation du sol est donc insoutenable ; que c’est à peine si elle est soutenue, car ses partisans n’ont pu citer un seul fait dans l’histoire d’une colonisation ancienne ou moderne qui puisse infirmer, en quoi que ce soit, la grande loi qui fait que les hommes pauvres et disséminés énoncent leurs opérations avec les outils de puissance inférieure, — passant de là progressivement à de plus puissants, dont ils obtiennent les services lorsque la combinaison avec leurs semblables les met en état de les demander aux mains de la nature.

D’après cela on pourrait croire que la théorie de la rente passerait paisiblement en liberté dans les limbes de l’oubli, — prenant place à côté du système de Ptolémée, la théorie de la transmigration des âmes et la loi imaginaire qui lui sert de base. Point. Le monde reçoit de nouveau l’assurance que la grande loi de M. Ricardo n’a changé en aucune manière l’état des choses, — sa théorie de la rente existant par elle même et ne demandant pour se souvenir d’autre preuve que celle résultant de ce fait : que les différentes pièces de terre payent des rentes différentes.

M. Ricardo n’a pas donné au monde simplement une théorie de la rente, mais une grande loi en vertu de laquelle la tendance à l’esclavage final du travailleur croit à mesure que s’accroît la population et que diminue la puissance du sol. Ses successeurs, aujourd’hui, prétendent qu’il n’importe nullement que l’homme gagne ou perde en pouvoir de commander les services de la nature, qu’il en devienne davantage l’esclave ou le maître, la loi de distribution étant la même dans l’un et l’autre cas. « En admettant qu’il soit exact que la culture ait débuté par les sols de qualité inférieure, n’est-il pas évident, dit-on, que ces sols de qualité inférieure ont été dans le principe les plus productifs ? M. Ricardo, en parlant des sols les plus riches et les plus fertiles, ne parle-t-il pas évidemment de ces sols pauvres et infertiles qui auront été d’abord soumis à la culture ? N’est ce donc pas parfaitement d’accord avec sa théorie de supposer que ces sols de qualité moindre auront été les