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avoir affirmé que l’intérêt baisse là où s’accroissent la richesse et la population ; — à cause de la nécessité constamment croissante d’appliquer le travail aux sols plus pauvres — il enseigne que c’est dans les pays où les salaires sont infimes que l’intérêt est élevé, par exemple, au Bengale, où le fermier paye 40, 50 et jusqu’à 60 %, ou en Sicile, à l’époque où Brutus se contentait de 48. Il est difficile cependant d’imaginer quelque chose de mieux calculé pour amener ces salaires infimes, et par conséquent l’intérêt exorbitant, que ces mêmes circonstances que l’on décrit comme l’accessoire invariable de l’accroissement de richesse et de la baisse d’intérêt, — une nécessité croissante d’appliquer le travail à des sols qui d’année en année le payerait de moins en moins. Cherchez dans Hume ou Smith une logique suivie partout où ils ont traité la question de monnaie, ce serait aussi bien perdre son temps que la chercher chez Ricardo et Malthus, lorsqu’ils traitent de l’accroissement de richesse et de population.

Tous les faits que l’on étudie soit dans le présent soit dans le passé concourent à prouver la vérité universelle de cette assertion : que le taux de profit et le taux d’intérêt tendent nécessairement à baisser à mesure que les prix des matières premières et ceux des produits achevés tendent de plus en plus à se rapprocher. La population des États-Unis donne une quantité constamment croissante de blé, riz, farine, coton et tabac, pour une quantité décroissante d’or, d’argent, de fer, de plomb et d’autres métaux, d’où il suit que chez elle taux d’intérêt est tellement élevé[1].

§ 12. — Absence de logique dans les doctrines de l’école Ricardo-Malthusienne.

M. Mill pense « qu’il existe pour chaque époque et pour chaque lieu un taux particulier de profit, qui est le plus bas qui

  1. De ce que l’intérêt et les salaires sont bas en Hollande, et élevés dans les États-Unis, on serait tenté de supposer qu’il y a là exception à la règle générale exposée ci-dessus. En examinant mieux on voit au contraire sa confirmation. La première vit sur les accumulations du passé, les autres vivent en tirant sur l’avenir. Le pur rentier est forcé de se contenter du taux le plus bas de profit et des plus petits salaires. Le prodigue boit, mange, et se réjouit, mais il finit à l’hospice. La population des États-Unis vit sur la vente de son sol. Si l’on évaluait l’énergie potentielle dont on dépouille la terre chaque année, d’après le prix que l’on paye au Pérou pour le guano destiné à la rétablir en partie, on trouverait probablement que cela monte à bien près de la moitié de la valeur totale donnée à la terre par les générations qui l’ont occupée depuis l’époque des Puritains, (Voyez précédemment, vol. II, p. 200.) Voilà pourquoi la proportion de la propriété mobile à celle fixée est si élevée, et si forte la tendance au rétablissement final de l’esclavage dans toute l’Union.