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produire devient, chez lui, un acte de consommation — c’est un fond pour reconstruire le capital musculaire et intellectuel, résultat de la consommation précédente. « Cet ordre de choses qui est en général établi par la nécessité, quoique certains pays puissent faire exception, se trouve en tout pays fortifié par le penchant naturel de l’homme. Si ce penchant naturel n’eût jamais été contrarié par les institutions humaines, nulle part les villes ne se seraient accrues au-delà de la population que pouvait soutenir l’état de culture et d’amélioration du territoire dans lequel elles étaient situées[1]. On aurait vu partout l’artisan et le laboureur se placer auprès l’un de l’autre là où la nourriture était à bon marché, il y eût eu économie de force et capital créé, « tandis que la beauté de la campagne, les plaisirs de la vie champêtre, la tranquillité d’esprit dont on espère y jouir, et l’état d’indépendance qu’elle procure réellement, partout où l’injustice des hommes ne vient pas s’y opposer, auraient présenté ces charmes plus ou moins séduisants pour tout le monde. » De la sorte chaque lieu sur la terre eût été un marché pour les produits de la terre. « Le marché domestique le plus important de tous, celui qui donne le plus de profits à égalité du capital employé, — celui qui a créé la plus grande demande de travail, car il crée la plus grande offre de choses à échanger et accroît ainsi la circulation, — n’en serait pas arrivé à être considéré ainsi qu’il l’est aujourd’hui comme subsidiaire au commerce étranger[2]. » Voilà ce qu’enseigne Adam Smith ; aussi est-il impossible de lire son livre sans un sentiment d’admiration pour l’homme qui a vu si nettement et de si bonne heure, la politique la plus propre à développer la prospérité, la moralité, la force et l’indépendance tant chez l’homme que chez les nations. Convaincu de l’avantage qui résulte de la division de la terre, il indique nettement la marche pour atteindre le but. « Sympathisant avec le petit propriétaire, qui est familier avec chaque partie de son petit domaine, qui le voit avec l’affection qu’inspire naturellement la propriété, surtout la petite, et qui fait sa joie de la cultiver et même de l’orner, il ne pouvait manquer de sentir, que le petit propriétaire est, de tous les améliorateurs, le plus industrieux, le plus intelligent et celui

  1. Adam Smith, Richesse des nations, liv. III, chap. I ; traduction de Garnier. Paris, Guillaumin.
  2. Smith.