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sances et de beaucoup des nécessités de la vie ? Les besoins existeront encore, mais où seront les utilités avec lesquelles payer les envois ? Nulle part, — car la Grande-Bretagne n’a de son crû rien à vendre. Toutes ses accumulations et la plus grande partie des fournitures nécessaires à sa population et à l’entretien de son gouvernement dérivent de profits — faits en achetant le coton, la laine, le blé et les autres produits bruts à vil prix, et les revendant cher ; et du moment que ces profits ne seront plus faisables, elle cessera d’avoir le pouvoir de nourrir ou de vêtir sa population, à moins d’un changement total de système.

Un tel changement visera à élever le travailleur au lieu de le déprimer, — à développer ses facultés au lieu de les comprimer, — à faire de lui un homme au lieu d’une pure machine[1], — à développer le commerce parle développement des pouvoirs scientifiques et artistiques de la population, — et non à augmenter le pouvoir du trafic par mille ruses pour chasser le pauvre Hindou de son métier à tisser, et pour empêcher les différentes nations du globe de se servir elles-mêmes des dons de Dieu, sous la forme de houille, de métaux, de vapeur et d’autres pouvoirs. Un tel changement cependant demandera beaucoup de temps, — la tendance du système pendant une si longue période ayant été d’abrutir le travailleur et le réduire à une condition qui est à peu près l’esclavage[2].

  1. « La carte entière de la vie humaine, comme on le voit aujourd’hui en Angleterre, présente de violents extrêmes de condition, de hauts sommets de richesse et de luxe, contrastant avec d’horribles profondeurs de pauvreté et de dégradation ; mais, quant à l’habileté intellectuelle, nous trouvons d’immenses terrains plats d’uniformité, des niveaux morts de talent respectable, avec à peine quelque chose d’originalité, de fraîcheur ou de génie créateur dans aucune branche de littérature, d’art, de science, ou même de négoce. » (Johnson. England as it is. vol. I, p. 217).
  2. « N’est-il pas notoire qu’un fabricant anglais n’a jamais fait une seule découverte utile dans les arts et dans les sciences ? Nous avons beaucoup ouï parler de l’école de Manchester. Qu’a-t-elle jamais produit de scientifique ou d’utile ? A-t-elle un nom duquel se vanter en chimie ? Peut-elle citer un Fourcroy ? Peut-on citer un fabricant de Manchester qui ait écrit sur quelque sujet scientifique se rapportant à sa profession ? Pourquoi, monsieur, est-il bien avéré qu’ils ne connaissent pas plus les agents chimiques nécessaires pour leurs propres œuvres d’impressions que ne les connaissent les blocs dont ils se servent ? Ils ont été obligés de confesser que c’est uniquement à l’avilissement actuel des salaires qu’ils doivent de trouver un marché ; qu’il n’est personne en Europe qui ne préfère le goût plus artistique et les fabrications plus belles de la France, ou même du fabricant chinois. » (Ibid., vol. I, p. 293 ; cité de Drummond. Debate, House of Commons, February 19, 1850).