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dans quelques-uns des plus misérables villages de l’Irlande plus de pauvreté qu’ici, mais rien de plus abject en malpropreté et en ordures[1].

C’est dans de telles circonstances que la partie agricole de la population décline continûment[2], avec une diminution constante de la faculté de payer pour les produits des autres pays, — et une nécessité correspondante d’accroître les efforts pour réduire le prix du coton, sucre, café et laine, — et un accroissement correspondant dans la tendance vers l’asservissement de l’homme sur tout le globe.

Beaucoup de cela se dirait avec autant de vérité à propos de la France ; une partie de sa population, comme le lecteur l’a déjà vu, est mal nourrie, vêtue et logée. Il s’agit cependant d’une question de progrès ; et il est très certain que la condition des travailleurs ruraux de cette contrée s’est améliorée bien plus vite[3] que celle des

  1. English Agriculture, p. 390.
  2. « Prenez la moitié nord du royaume d’abord, et que trouvons-nous ? Sur la moitié des paroisses et sur les deux tiers du sol de l’Écosse, la population a diminué ! Le fait que nous pouvons qualifier d’étonnant est établi par le dernier recensement, et tout le monde l’accepte. Sur les deux tiers de son étendue, l’Écosse a subi une diminution positive du nombre de ses habitants, — une diminution non seulement relative (c’est-à-dire par rapport à l’accroissement de la population générale), mais absolue, la population dans ces contrées étant tombée au-dessous de ce qu’elle était auparavant. Et ce qui est à noter, cette diminution est universelle parmi les districts agricoles. Les terres vagues du Sunderland, les noires montagnes d’Argyll, sont à peine (si même elles le sont), en décroissance plus forte que les riches terroirs des Lowlands, — que les vertes collines des Borders ou la région arcadienne de l’Ettrick et d’Yarrov. Bonnie Teviotdale, avec ses coteaux exposés au soleil, et la vallée ombragée de la belle Tweed, présente le même phénomène que les vallées plus sombres de la Nith et de la Spey. « Les fleurs de la forêt s’en vont ! La lamentation sur la perte des os et des nerfs du pays après la désastreuse bataille de Flodden peut se renouveler encore aujourd’hui avec plus de justice et non moins de regret. — La guerre a fait la première éclaircie, — la paix et les fausses théories ont fait la dernière. Ce qu’on a appelé le « progrès social va balayant des champs notre paysannerie. Les acres que leurs pères tenaient à loyer ou possédaient sont maintenant engloutis dans les latifundia qui s’introduisent sur le pays. Ils ont eux-mêmes émigré ou sont allés grossir le paupérisme et choir dans la dégénérescence physique des ateliers des cités. Une civilisation à la Juggernauth les écrase sous les roues de son char qui marche… Tournons-nous vers l’Angleterre ; nous trouvons le même triste spectacle. Entre 1831 et 1841, pas un comté (bien que ce fut le fait de plusieurs paroisses), ne montrait une diminution de population ; mais, dans les dix ans qui ont suivi, c’est-à-dire de 1841 à 1851, comme nous apprend le dernier recensement, on ne compte pas moins de 27 comtés entiers ayant subi une diminution. (Blackwood’s Magasine. December 1855.)
  3. « Prenez le cas du Lincolnshire, le district le mieux cultivé de l’Angleterre et le