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de la quantité, comme c’est le cas pour les métaux précieux.

Les journalistes mêmes qui attaquent le plus ce qu’ils qualifient un préjugé, prouvent qu’ils le partagent par le soin qu’ils prennent de signaler l’afflux de monnaie comme sujet de joie, et son départ comme cause de regret. Depuis la classe la plus élevée jusqu’à la plus infime, partout les hommes regardent le premier comme l’avant-coureur de temps meilleurs, — et l’autre comme le précurseur de temps où les échanges vont diminuer et les hommes souffrir faute de subsistances et de vêtements ; et ce que tout le monde désire savoir, c’est — par quel moyen peut-on assurer pour jamais les temps meilleurs ? Pour s’éclairer quelque peu là-dessus, ils s’adressent en vain à la Richesse des Nations, dont tous les enseignements, en tant ce qui concerne la monnaie, sont en opposition directe non seulement avec le sens commun de l’humanité, mais avec les faits que fournit l’histoire du monde entier.

§ 9. — Opinion du docteur Smith : qu’il n’est point d’utilité dont on puisse mieux se passer que celle qui, selon d’autres économistes, est l’instrument indispensable de société.

« Si l’or et l’argent, dit Smith, pouvaient une fois venir à manquer dans un pays qui aurait de quoi en acheter, ce pays trouverait plus d’expédients pour suppléer à ce défaut, qu’à celui de presque toute autre marchandise quelconque. Si les matières premières manquent aux manufactures, il faut que l’industrie s’arrête. Si les vivres viennent à manquer, il faut que le peuple meure de faim. Mais si c’est l’argent qui manque, on pourra y suppléer, quoique d’une manière fort incommode, par des trocs en nature. On pourra y suppléer encore et d’une manière moins incommode, en vendant et achetant sur crédit ou sur des comptes courants que les marchands balancent respectivement une fois par mois ou une fois par an. Enfin, un papier-monnaie bien réglé pourra en tenir lieu, non-seulement sans inconvénient, mais encore avec plusieurs avantages. Ainsi, sous tous les rapports, l’attention du gouvernement ne saurait jamais être plus mal employée que quand il s’occupe de surveiller la conservation ou l’augmentation de la quantité d’argent dans le pays[1].

L’on suppose ici que le crédit remplace la monnaie qui s’écoule, tandis que l’expérience nous apprend que le crédit croît à mesure que croissent les facilités d’obtenir la monnaie. » donnant ainsi à ces petites quantités une grande utilité. Il diminue avec la diminution

  1. Richesse des Nations, livre IV, chap. i.