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dix ans, nous trouvons des résultats exactement semblables, — le taux moyen d’intérêt chez elle ayant été de près de 12 %[1]. Avec un capital total de 24.000.000, elles ont une circulation de non moins de 86.000.000 ; et par la simple raison, que dans leur sphère d’action elles jouissent d’un monopole aussi parfait que celui de la banque de France elle-même. D’après quoi elles ont suivi aveuglément les traces de la grande institution, comme ça toujours été le cas en Angleterre. Quand elle s’épandait, elles s’épandirent ; quand elle se resserra, elles firent de même, — toutes leurs opérations tendant à un peu plus qu’augmenter les changements qui sans elles auraient été produits. Elles ont cependant disparu depuis, et toutes les affaires de banque de l’un des plus riches pays de l’Europe sont aujourd’hui dans les mains d’une seule institution, — ayant un capital de 91.000.000, et présentant des débets et des crédits qui montent à plus de 1.000.000.000 francs. Ses actions qui, dans le principe, ont coûté 1.000 francs, se vendent aujourd’hui 3.200, dont l’intérêt, au taux ordinaire de l’escompte, donnent 16  %[2].

En affaires ordinaires, l’homme qui court des risques considérables dans l’expectative des gros profits, se ruine généralement. Ici cependant il en est autrement, — les risques et profits n’y marchent pas de compagnie pour l’ordinaire. Les premiers sont engendrés par la banque, mais quand vient le jour d’épreuves, c’est la population qui les subit, — le profit se montrant toujours d’année en année dans les dividendes grossissants des actionnaires, et augmentant constamment le prix des actions.

§ 6. — Centralisation politique et monétaire de la France. Elle tend à affaiblir l’action sociétaire et à diminuer le montant de commerce. Elle est contrebalancée, à un certain degré, par la maintien d’un système qui a pour objet d’affranchir la terre de la taxe de transport et de favoriser l’accroissement de commerce.

Dans les deux mondes physique et social, l’accroissement de force résulte de l’accroissement de vitesse du mouvement, l’usage du billet de circulation tendant à donner cette vitesse, et on a pour effet l’accroissement rapide de commerce et de pouvoir de la France.

  1. Du Crédit et des Banques, p. 294.
  2. « Toute spéculation extravagante en Angleterre, dit le Quarterly Review, a son principe dans la révolte de John Bull contre le deux pour cent comme taux d’intérêt. » Il en a été de même en tout temps en France, dont la grande banque monopolise les valeurs et réduit ainsi la monnaie au point auquel la révolte se produit. « Quelques écrivains, poursuit l’auteur de l’article, émettent un nouveau système, ou en ressuscitent un vieux, « après quoi, canaux, travaux hydrauliques, houille et gaz ont leur tour. » Cependant lorsqu’il s’agit de payer pour tout cela, il se trouve que le surplus apparent de monnaie n’a consisté qu’en un surplus réel d’obligations de banque, — qu’il s’agit maintenant de payer. Alors vient la débâcle, pour la ruine de tous, — le prêteur de numéraire excepté.