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que le stock en lingot dépassait à peine un million, un ordre du conseil fut rendu, autorisant la banque à suspendre le payement de sa dette. Depuis lors, pendant près d’un quart de siècle, son papier constitua la seule circulation légale du pays ; et les chiffres suivants montrent comment cette circulation fut administrée :

  Dette.   Lingot.
Août 1797 18,879,470 4,089,620
1804 26,869,420 5,879,190
1810 34,875,790 3,099,270
1814 43,218,230 2,097,680
1815 39,944,670 3,409,040

La circulation ayant monté dans cette dernière année à 26.000.000 livres, il suit que des billets et effets qu’elle avait alors, il n’y avait pas moins de 10.000.000 livres, représentant la propriété d’autrui déposée dans ses caves. Recevant intérêt pour l’usage et n’en payant aucun, la banque était en mesure de donner à ses actionnaires un taux double d’intérêts, — toujours un indice d’erreur dans le système[1]. Les possesseurs réels de ces millions étaient, et se sentaient être en pleine possession du pouvoir d’acheter, comme ils l’auraient fait s’ils avaient eu l’or lui-même dans les mains ; et pourtant l’or n’était ni en leur possession, ni dans celle de la banque, mais en celle d’une troisième classe d’individus à qui la dernière l’avait prêté. Ces 10.000.000 livres ont eu le même effet sur le prix que si ce chiffre eût été doublé, — étant devenus, pour le moment, pour tous projets et opérations, 20.000.000 livres. Cette double action était une conséquence de la cupidité de la banque elle-même, cherchant à accaparer les valeurs et empêchant ainsi le libre placement du capital particulier. Mieux cet objet s’atteint, plus la dette de l’institution s’étend, et plus gros seront les dividendes ; mais plus son action doit être instable, comme on en eut bientôt la preuve.

§ 4. — Changements qui surviennent après la fin de la guerre. Reprise des payements en espèces. Elle amène une large ruine. Les classes productrices sont approuvées tandis que celles purement consommatrices s’enrichissent.

En 1817, le lingot s’élevait à 11.668.,000 livres, tandis que les obligations étaient tombées à 38.600.000 livres. Les emprunts de capital prêté n’étaient donc que 27.000.000, ou moins de 2.000.000

  1. En surcroît de ces gros dividendes elle avait accumulé graduellement un excédant qui, en 1816, montait à plus de 3.000.000 liv., et qui fut alors ajouté au capital nominal. Alors, comme jadis, le surcroît prit la forme d’une annuité payable par le gouvernement.