terre, basée, comme le fut cette institution, sur une pure annuité payable par le gouvernement, — et négociant, comme elle a toujours fait, presque entièrement sur les moyens d’autrui, et non sur ses moyens propres. Le marchand qui commencerait ses opérations par précipiter son capital dans une annuité fixe, — dans la confiance d’obtenir à crédit tous les articles qu’il désire vendre, — trouverait sa situation très-instable ; et comme ce fut là précisément la manière de débuter de ce grand établissement, rien d’étonnant que sa marche se soit distinguée par le manque de solidité et de régularité. Contenant en elle tous les éléments qui, dans le cas d’un particulier, eussent amené de tels résultats, et exerçant un pouvoir auprès duquel celui des Plantagenets et des Lancastres eût passé pour tout à fait insignifiant, elle a produit des oscillations plus grandes, en une année, qu’ils eussent pu faire en une suite de siècles.
Réduire la valeur réelle de la livre de 20 sh. à 6 sh. 8 d., tout en conservant le nom primitif, — faisant ainsi passer une seule once pour trois, — c’était un mouvement constant dans la même direction, — tout restant tranquille à partir de la date de la réduction jusqu’à la venue de la période, où une réduction plus forte devenait nécessaire. Dans le cas de la banque en question, tout est différent ; — la valeur de la monnaie, montant en un instant pour retomber tout à coup, et les oscillations allant jusqu’à 50 ou 60 % à de si faibles intervalles, qu’on les peut compter par semaines ou par mois. La grande institution profite de cette instabilité d’opération ; — moins on accorde de crédit aux particuliers ou à d’autres banques, plus s’accroît la nécessité de la regarder comme la seule place de sûr dépôt, — plus augmente la quantité de monnaie mise à sa disposition, — et plus grossissent les dividendes sur son stock. Les intérêts de la banque et ceux de la communauté se trouvent ainsi en antagonisme ; et pourtant c’est à la première qu’est confiée la direction de la grande machine, du bon maniement de laquelle dépendent entièrement la continuité et la vitesse de circulation de l’autre, comme la circulation du sang dépend d’une fourniture convenable d’aliment et d’air. C’est là un très-étrange système, — un système qui non-seulement a exercé, mais exerce encore une immense influence, — aussi allons-nous consacrer à son examen un temps quelque peu en rapport avec son importance.