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présentant de quelque placement déjà existant — l’individu de qui elle achète voudra sans nul doute user des moyens mis à sa disposition, pour créer quelque nouvelle espèce de placement — personne ne permettant volontiers à son capital de rester oisif et stérile. Si cet achat se fait avec la monnaie des autres, l’effet inévitable sera d’élever les prix et de stimuler le dernier possesseur de la valeur acquise à redoubler d’activité pour se pourvoir d’un nouveau placement. Cela fait, il demandera, soit directement, soit indirectement, payement en espèces, et alors il faudra se départir de la valeur pour pourvoir aux moyens de payement. Les prix doivent alors tomber parce que le créditeur de la banque s’est efforcé de trouver emploi pour un capital qui n’a point d’existence réelle sous toute autre forme que celle d’un chemin de fer, d’un canal ou quelque autre travail public, ou d’une dette déjà créée et non susceptible d’être employée à créer d’autres routes et canaux ; et de la sorte tandis que la partie en dehors de la banque, a cherché à placer ses fonds, la banque elle-même a acquis l’évidence qu’ils sont déjà placés et qu’on tire intérêt pour leur usage. La double action ainsi produite a pour conséquence infaillible l’enflure et la spéculation qui seront nécessairement suivis de panique et de ruine.

§ 12. — Grand pouvoir des banques pour le bien ou le mal. Les monopoles de banque, comme ceux de France et d’Angleterre, donnent à quelques individus un pouvoir sur le mouvement sociétaire, pouvoir en comparaison duquel celui qu’ont exercé les anciens souverains est insignifiant.

Nous n’avons donné ce rapide aperçu que pour montrer les effets naturels et infaillibles d’accorder à des particuliers, un monopole d’autorité sur les mouvements du grand instrument, dont l’approvisionnement convenable est si indispensable au mouvement régulier et suivi de la machine sociale À propos de Philippe le Bel, changeant à plusieurs reprises le poids de la monnaie à l’usage de ses sujets, il est de mode aujourd’hui de flétrir de pareils procédés par la censure la plus énergique ; et pourtant les difficultés qui en résultent sont insignifiantes, comparées à l’effet d’extensions et de contractions comme celles dont nous parlons. Les changements du monarque affectaient les marchands et le peuple de Paris et de quelques villes et cités ; mais quant à la grande masse des échanges du royaume, ils n’étaient nullement sentis, — le travail à cette époque se donnant généralement pour la nourriture et le vêtement, comme aujourd’hui dans les États-Unis du Sud, au Brésil et à Cuba. Aujourd’hui néanmoins le cas est très-différent, — la société au mouvement lent du temps des Valois ayant fait place à la société au mouvement rapide du temps des Bourbons et