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tenues de consacrer un seul instant à la tâche de compter les espèces.Ce fut là une importante invention, et grâce à elle, l’utilité de la monnaie s’est tellement accrue qu’un simple millier de pièces peut faire plus de besogne, que sans elle on n’en ferait avec des centaines de mille.

Ceci, nous dit-on, détrône l’or et l’argent et conduit à leur exportation. La chose nous est affirmée positivement par ces modernes économistes politiques, qui regardent l’homme comme un animal qui veut être nourri et procréera, — et qui ne peut être amené à travailler que sous la pression d’une forte nécessité. S’ils avaient cependant songé rien qu’une fois, à l’homme réel, — l’être fait à l’image du Créateur, et capable de s’élever presque à l’infini, — peut-être seraient-ils arrivés à une conclusion très-différente. Les aspirations de cet homme sont infinies, et plus satisfaction leur est donnée, plus vite le nombre en augmente. Le misérable Hottentot ne se sert de route d’aucune sorte ; mais nous voyons le peuple éclairé et intelligent d’autres pays passer successivement du chemin vicinal à la route à péage et de là au chemin de fer ; et plus les communications existantes s’améliorent, plus augmente la soif d’amélioration nouvelle. Meilleures sont les écoles et les maisons, plus le désir s’avive d’instituteurs supérieurs, et de nouveaux surcroîts aux conforts de la demeure. Plus la circulation sociétaire se perfectionne, plus augmente la rémunération du travail et plus s’accroît le pouvoir d’acheter l’or et l’argent pour l’appliquer aux différents usages auxquels ils s’adaptent si admirablement et plus augmente la tendance à ce qu’ils coulent vers les lieux où la circulation est établie. La monnaie favorise la circulation sociétaire. Le mandat et la bank-note stimulent cette circulation — donnant par là valeur au travail et à la terre ; et partout où ces mandats et ces banks-notes sont le plus en usage, là s’établira le plus large et le plus constant afflux des métaux précieux.

Comme preuve qu’il en est ainsi, nous avons les faits que, depuis plus d’un siècle, les métaux précieux du monde ont tendu le plus vers la Grande-Bretagne, qui fait le plus usage de telles notes. L’usage en augmente rapidement en France, suivi d’un accroissement constant de l’afflux de l’or. De même en Allemagne où le courant aurifère s’établit avec tant de fermeté que les billets qui représentent la monnaie se substituent rapidement à ces morceaux de papier