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tre le grain par le tisserand, tandis que celui-ci ne reçoit qu’une très-faible portion du blé donné par le cultivateur du sol. Tous les deux continuent donc à rester pauvres, tandis que le transporteur s’enrichit, comme le montre l’immense richesse accumulée par les Fugger et les Médicis, — par les Vénitiens, les Génois et autres « princes marchands » du moyen âge. Les parties réelles de tout échange étant les producteurs et les consommateurs, ils arrivent enfin à voir de quel grand avantage serait pour eux la diminution de frottement dans la machine, quand bien même ils ne pourraient entretenir leur commerce complètement libre de toute charge pour une agence intermédiaire.

Population et richesse augmentant, le sentier se convertit graduellement en route, que l’on pave ensuite avec de la pierre, mais qui enfin est remplacée par le chemin de fer, tandis qu’à la mule au pas lent se substitue la rapide locomotive. À chaque pas dans ce sens, nous trouvons diminution de la quote-part retenue par le transporteur, et augmentation de ce que se partagent le producteur et le consommateur. Accroissement du pouvoir d’association, — accroissement de circulation manifesté par un grand accroissement de production et de consommation, — et accroissement d’individualité parmi les membres de la communauté, — sont alors accompagnés d’un accroissement rapide dans le pouvoir d’accumuler l’outillage pour un progrès ultérieur.

Il en est de même dans l’œuvre de conversion. Dans les premiers âges de société, la quantité de travail qui intervient entre la production du grain et la consommation du pain est énorme. Le producteur doit broyer son grain entre deux pierres, ce qui lui prend une part considérable de son temps, qui pourrait être mieux employée à augmenter la quantité de grains à mettre en terre. Par degré le moulin se rapproche, grâce auquel il épargne beaucoup de temps, bien que le moulin soit encore à distance de sa ferme. Cependant, population et richesse augmentant, il trouve un moulin dans son voisinage immédiat, et dès lors il échange directement avec le meunier, — épargnant ainsi tout le temps qu’il perdait auparavant sur la route. — De là pour lui double gain : — il obtient plus de farine pour moins de blé ; il économise un travail qui peut s’appliquer à augmenter la quantité de ce même blé.

Nous avons ici précisément les mêmes résultats que ceux obtenus