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l’adoption du principe protecteur. D’après quoi, il semble parfaitement avéré que si le planteur de coton désire obtenir pour son produit cette vitesse de circulation qui est nécessaire pour en élever le prix, il doit marcher dans la direction du tarif protecteur de 1842, et non dans celle du libre échange de 1846.

La première tend à produire le mouvement dans chaque partie de la société, — facilitant la vente du travail et mettant chacun en mesure d’acheter subsistances et coton. La dernière arrête la circulation, empêche la vente du travail et détruit ainsi le pouvoir d’acheter aliment et vêtement. L’une n’a duré qu’un peu plus de cinq ans et cependant a doublé le marché du planteur, et même alors son action ne faisait que commencer. Si elle eût continué jusqu’au moment actuel, la consommation domestique de coton serait maintenant à raison de 20 livres par tête, — absorbant un peu moins que moitié de la récolte actuelle et mettant son producteur en mesure d’obtenir plus pour la moitié exportée qu’il n’obtient pour tout ce qui se consomme soit à l’intérieur, soit au dehors. Le planteur profiterait par un accroissement de consommation domestique, même quand il ne recevrait rien en échange pour son surcroît de coton. Combien plus alors il profiterait par un tel accroissement lorsque son effet eût été d’élever le prix du tout quelque pût être le lieu de consommation. La civilisation avancerait alors, car la terre s’enrichirait du résidu de ses produits. L’agriculture monterait à l’état de science, et à chaque pas dans cette direction l’harmonie reparaîtrait ; en même temps que l’homme avancerait rapidement dans sa condition physique, morale et intellectuelle, — gagnant en lumières, en bonheur et en liberté.

On objectera cependant que le coton fut à bas prix dans la période qui suivit 1842. — Certainement, et par la raison que le recours à la protection fut provoqué par la ruine dont le système opposé avait été la cause. L’homme qui sème ne doit pas s’attendre à récolter à l’instant ; le mécanicien ne s’attend pas à ce que son train se mette en plein mouvement à l’instant même où il applique la vapeur. Fermier et mécanicien comprennent fort bien qu’il faut du temps, et c’est un élément de la plus haute importance dans le calcul ; et pourtant les économistes modernes n’en tiennent aucun compte. Arrêter une machine sur une pente est une chose difficile, mais lui faire remonter la pente est une chose qui exige une plus grande