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New-York, en même temps qu’il remplit sa capitale d’une énorme population de pauvres et de vagabonds. C’est lui qui épuise le sol à l’intérieur, et conduit à la soif de s’approprier les îles à guano dont la propriété à conserver coûtera une guerre ; et cependant il s’exporte annuellement du sol des États de l’Amérique, une masse d’engrais probablement plus considérable que celle qui se puisse trouver dans toutes les îles à guano du monde.

Le commerce diminue la nécessité des services du transporteur, et diminue son importance. Le trafic le fait maître des hommes qui conduisent la charrue et la herse. L’un ouvre des mines et construit des fourneaux, et crée ainsi le pouvoir de faire des routes. L’autre détruit le pouvoir de les entretenir ; mais il crée de grands entrepôts dont le maniement est dirigé de manière à taxer le commerce local pour l’entretien d’un commerce lointain, et pour accroître ainsi la nécessité de l’émigration et le besoin de routes[1]

  1. Les désastreux effets de la dispersion sont bien exposés dans le passage suivant, qui décrit l’état des affaires sur la rivière Rouge supérieure, en Louisiane.
      « On n’a jamais vu pareil état de choses. Jusqu’à ce moment, la rivière Rouge n’a point été navigable et on n’a pas embarqué une seule balle de coton. Des mille et des dix mille balles sont sur les bords de la rivière Rouge et de ses affluents, attendant une crue. Non-seulement on a manqué à expédier le coton ; mais comme une conséquence nécessaire, aucune fourniture d’aucune espèce ne nous est arrivée. Nous n’avons pas de communication parchemin de fer, et la population bien que riche, pour un grand nombre, est dans un état alarmant de dénuement. La farine vaut 90 dollars le baril et on ne peut s’en procurer qu’à quatre-vingt-dix milles de distance. Le blé commande 2 dollars par boisseau et tout le reste en proportion. » — Cincinnati Commercial Journal.
      Il en est exactement de même en Californie comme on le voit par le passage suivant.
      « Nous sommes ici sujets à ces lois qui règlent l’offre et la demande — dans des localités où le consommateur et le producteur sont séparés par des mers qui veulent des mois de navigation… Nous importons tout ce que nous consommons… Il en résulte pour nous cette position dans le monde commercial que nous sommes sujets à une grande variation dans les prix et la quantité des articles principaux, — ceux notamment que le mineur et l’agriculteur consomment. Un jour la hausse est énorme et désastreuse pour le consommateur ; un autre jour la baisse est telle qu’elle ruine à la fois le protecteur et le marchand… Notre expérience prouve d’une manière concluante que tous les pays qui s’approvisionnent à des sources étrangères et lointaines, occupent une position tout à fait précaire, humiliante et dépendante. Ils se mettent à la merci des autres et ne peuvent jamais jouir d’une véritable indépendance. Leur approvisionnement dépend de tant de circonstances qu’aujourd’hui c’est bombance et demain famine — aujourd’hui baisse excessive, demain excessive hausse — un pays des extrêmes ; et il n’en peut être autrement sous un tel système. Le remède est de fabriquer nous-mêmes nos articles et de produire notre grain. » — Sacramento Union.