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montant du transport intérieur, même en admettant que l’aire de culture soit restée la même. Nous savons cependant que dans cette période elle a quadruplé et doit avoir exigé quinze fois, sinon vingt fois plus de force d’hommes, de chevaux, de chariots. Tenant compte de ce fait, le lecteur verra facilement que le planteur doit, dans ces années, avoir donné plus de 700.000.000 livres pour moins de deux fois la somme qu’il a reçue trente ans auparavant pour moins que 80.000.000.

1849     1.026.000     66.000.000 dollars

Ici nous avons environ 940.000.000 livres à transporter de plus qu’en 1815-16, et cela d’une aire de culture qui par suite de l’épuisement incessant du sol, s’est de nouveau énormément étendue[1] ; sur quoi, l’on peut fort bien mettre en doute si la somme de nu-

  1. Voici un passage d’un discours d’un citoyen d’Alabama, qui montre l’action du système dans un État dont l’existence ne date que de quarante ans:
      « Je puis vous signaler avec chagrin, dans les plus anciennes parties d’Alabama et dans mon comté natif de Madison, les tristes traces de la culture ignorante et épuisante du coton. Nos petits planteurs, après avoir effrité leur terre, incapables de la restaurer par le repos, l’engrais ou par tout autre procédé, vont plus loin à l’ouest et au sud en quête d’autres terres vierges qu’ils puissent dépouiller et appauvrir de la même manière. Nos planteurs plus riches, qui ont plus de moyens et non plus de savoir, achètent de leurs voisins plus pauvres, étendent leurs plantations et appliquent plus de force esclave. Les quelques riches qui sont en état de vivre sur de plus petits profits et de donner à leurs champs ruinés quelque repos, poussent ainsi devant eux le plus grand nombre qui sont purement indépendants. Des vingt millions de dollars réalisés annuellement des ventes de la récolte de coton d’Alabama, presque tout ce qui n’est pas dépensé pour l’entretien des producteurs est replacé en terre et en nègres. Ainsi la population blanche a diminué et la population esclave a augmenté à peu près pari passu dans quelques contrées de notre État. En 1825, le comté de Madison émettait environ 3.000 votes, aujourd’hui, il n’en peut pas émettre plus de 2.300. En traversant ce comté, l’on voit de nombreuses fermes, naguère le séjour d’hommes libres, industrieux et intelligents, occupées maintenant par des esclaves ou sans tenancier aucun, abandonnées et dilapidées ; l’on voit la mousse croître sur les murailles ; l’on voit des champs naguère fertiles, aujourd’hui sans haies, abandonnés et couverts de ces mauvais avant-coureurs, la queue de renard et la bruyère ; on voit la mousse croître sur les murs moisissants de ce qui fut naguère des petits villages. « On voit un seul maître réunir le territoire entier qui naguère formait les heureuses demeures d’une douzaine de familles blanches. Bref, un pays dans son enfance où c’est à peine si un arbre de la forêt avait senti la hache du pionnier, montre déjà tous les signes de sénilité et de décadence que l’on voit dans la Virginie et dans les Carolines. » — C. C. Clay.
      Pour l’épuisement et la pauvreté de la Caroline du Sud, un des plus vieux États, voir précédemment p. 85.