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assistance à son semblable, et la reçoit à son tour. À mesure que les relations commerciales se développent, le travail est économisé, les facultés intellectuelles sont stimulées, et l’on voit, peu à peu, l’intelligence remplacer la force physique. À mesure que l’intelligence se développe, l’homme acquiert la connaissance des lois naturelles, s’élevant, avec le secours de la physique la plus abstraite, de la chimie et de la physiologie, jusqu’à l’agriculture éminemment concrète et spéciale, la dernière de toutes dans son développement, parce qu’elle exige la connaissance préalable des nombreuses branches primitives de la science.

Pour que l’agriculture devienne une science, il est indispensable que l’homme rembourse toujours à la vaste banque dont il a tiré sa nourriture, la dette qu’il a contractée envers elle. La terre, ainsi que nous l’avons déjà dit, ne donne rien, mais elle est disposée à prêter toute chose, et lorsque les dettes sont remboursées ponctuellement, chaque prêt successif se fait sur une plus grande échelle ; mais lorsque le débiteur cesse d’être ponctuel, son crédit baisse, et les prêts diminuent graduellement, jusqu’à ce qu’enfin, il soit chassé de la maison. Il n’est aucune vérité, dans l’ensemble de la science, plus susceptible d’être prouvée que celle-ci ; à savoir que la société qui se borne à l’exportation de produits bruts, doit finir par l’exportation d’hommes, et d’hommes qui sont les esclaves de la nature, lors même qu’ils ne sont pas réellement achetés et vendus par leurs semblables. Jethro Tull introduisit le sillon et recommanda le labour profond et la complète pulvérisation des parcelles du sol ; agissant ainsi sous l’impression de cette idée, que l’espace ainsi gagné, combiné avec un défrichement plus complet, se trouverait équivaloir à l’engrais ; mais l’expérience lui enseigna bientôt que plus il enlevait à sa terre, plus elle s’appauvrissait, et moins était considérable la rémunération de tout son labeur. La persistance dans une pareille méthode aurait produit nécessairement la dispersion de la population, ainsi que l’abaissement dans la puissance d’association, dans le développement de l’individualité, et dans la faculté d’entretenir le commerce, en même temps qu’une constante détérioration de l’agriculture, et une diminution également constante de l’attraction locale, nécessaire pour résister aux tendances gravitantes de la centralisation. On peut constater aujourd’hui que tels sont les résultats de cette persistance, dans tous les