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les propriétaires du sol qui donnait ces produits. La méthode régulatrice de ces deux grandes lois était exacte, le fait seul de l’avoir adoptée a placé justement leurs auteurs au premier rang des économistes, et a donné à leurs ouvrages une influence que n’a jamais exercée aucun des auteurs qui ont écrit sur la science économique. Bien qu’ils soient tombés dans cette erreur dont nous avons parlé plus haut, qui consiste « à ne rechercher qu’une confrontation partielle et hâtive avec les faits » et que, conséquemment, ils aient fourni au monde des théories positivement contraires à la vérité, nous ne pouvons méconnaître quel avantage infini fût résulté pour le progrès de la science d’avoir les faits subordonnés à ces rapports, s’ils eussent été réels, ni de quelle importance il doit être d’avoir les faits réels, soumis à des rapports de cette nature, toutes les fois que cela est possible.

Prenons pour exemple la proposition suivante :

Dans la première période de la société, lorsque la terre est abondante et que la population est relativement peu considérable, le travail est improductif et sur le faible produit qui en résulte, le propriétaire du sol ou un autre capitaliste prélève une large proportion, n’en laissant qu’une très-mince au travailleur. Cette proportion plus large ne donne pourtant qu’une faible quantité, et le travailleur et le capitaliste sont pauvres tous deux ; et le premier à ce point qu’on l’a vu partout être l’esclave du second. Cependant la population et la richesse augmentant, et le travail devenant plus productif, la part du propriétaire du sol diminue en proportion, mais s’accroît en quantité. La part du travailleur augmente, non-seulement en quantité, mais aussi en proportion ; et plus a lieu rapidement l’augmentation de productivité de son travail, plus est considérable la proportion de la quantité augmentée qui lui reste en définitive ; et de cette façon, en même temps que les intérêts de tous deux sont dans une parfaite harmonie réciproque, il y a une tendance constante à l’établissement d’une égalité de condition ; l’esclave de la première période devient l’homme libre de la seconde.

Si l’on admet la vérité de notre assertion (et s’il en est ainsi, elle établit directement le contraire de ce qui a été avancé par Malthus et Ricardo), nous avons ici l’expression distincte d’un rapport mathématique entre les variations concomitantes de la puissance de l’homme et de la matière ; de l’homme représentant seulement