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à la volonté de son semblable et à la réalisation de la théorie malthusienne, en vertu de laquelle l’homme devient nécessairement le bûcheron et le tireur d’eau de son semblable.

§ 5. — Les lois de la nature agissent constamment dans la même direction. Mouvement oscillatoire de la théorie de la population offerte à l’examen par Malthus.

Le caractère distinctif et principal des lois de la nature, c’est qu’elles agissent toujours dans une direction unique. Après avoir constaté que la loi de gravitation est vraie à l’égard de la pomme qui tombe de l’arbre en ce moment, on peut affirmer infailliblement qu’elle l’est aussi, relativement à toutes les planètes dont se compose notre système, qu’elle a régi les mouvements de toutes les pommes qui sont tombées en tout temps, et régira à jamais les mouvements de celles qui tomberont, quelle que soit la durée du globe terrestre. Si nous admettons qu’il en est de même relativement aux lois qui dirigent les mouvements de l’homme, et si nous constatons qu’aux époques les plus reculées de l’état social, il est tout à fait pauvre et misérable, tandis qu’à des époques plus récentes, il devient plus fort et plus capable de se procurer des subsistances, il suit de là, nécessairement, que son pouvoir de commander les services de la nature, doit constamment augmenter, à mesure qu’il devient plus capable d’associer ses efforts à ceux des individus qui l’entourent.

Tout le monde admet, que telle est la tendance dans les premiers siècles de la société, les subsistances devenant alors plus abondantes, à mesure que la population s’accroît et que les individus peuvent, de plus en plus, travailler en s’associant réciproquement. Et cependant, selon Malthus, la loi ayant atteint un certain point, accomplit une évolution en sens contraire, et à chaque nouveau progrès qui a lieu dans la population et la richesse, les subsistances deviennent plus rares ; et il est nécessaire qu’une portion des individus qui occupent la terre « meurent régulièrement de besoin[1], » ainsi que l’avaient fait les Sauvages des premiers siècles[2].

  1. Mill père. Éléments d’économie politique, trad. par Parisot, p. 57.
  2. « Après une certaine phase peu avancée dans le progrès de l’agriculture ; aussitôt qu’en réalité les hommes se sont adonnés à la culture avec quelque énergie et lui ont appliqué des instruments passables ; à partir de cette époque, la loi de la production résultant de la terre, est telle que dans tout état donné de la science agricole, en augmentant la somme du travail, le produit n’augmente pas à un égal degré ; en doublant celui-ci, on ne double pas celui-là ; on pour exprimer la même idée en d’autres termes : tout accroissement de produit s’obtient par un accroissement plus que proportionnel dans l’application du travail à la terre. » Mill, John, Stuart. Principes d’économie politique, trad, par Dussarp et Courcelle-Seneuil, tom, 1, chap, xii, p. 203.