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doute que sa domination sur l’Inde repose sur la puissance du conquérant[1]. »

On dit cependant que la disparition des entraves imposées au commerce et le rappel des lois sur la navigation ont été la conséquence de l’amélioration des idées, et que ces mesures ont eu lieu par déférence pour l’esprit de progrès du siècle. S’il en était réellement ainsi, cet esprit se serait manifesté dans d’autres directions ; mais c’est ce qui n’a pas lieu, malheureusement. Il ne pouvait exister rien de plus injuste que l’impôt dont on a frappé toute la correspondance entre l’Amérique et le continent de l’Europe ; cependant on a persisté à le maintenir en dépit de toutes les remontrances. La population des Antilles a, depuis plusieurs années et infructueusement, pétitionné pour obtenir une modification dans les droits, qui lui permît de raffiner elle-même son sucre. Les colonies anglaises du Continent, et tout récemment celles de l’Amérique, décidèrent d’établir entre elles une réciprocité parfaite, en abolissant tous droits sur leurs produits respectifs ; et en agissant de la sorte, elles ne voulaient que mettre pleinement en pratique les idées produites avec tant d’insistance auprès du Gouvernement des États-Unis, relativement au traité de réciprocité — c’est ainsi qu’on l’appelait — qui venait alors d’être conclu avec le Canada. Cependant lorsqu’on eut soumis la question à l’examen du Gouvernement anglais, la réponse fut que le Gouvernement de Sa Majesté avait la confiance « qu’on ne lui demanderait pas de soumettre à son approbation royale des actes on des ordonnances mettant en pratique des mesures d’une nature semblable, ce qui serait incompatible avec le système impérial du libre échange[2] ! »

  1. Extrait des dépêches de lord Dalhousie, du 12 février 1852 :
      » La puissance britannique dans l’Inde ne pent songer tmpunément à montrer, méme momentanément, une apparence d’infériorité. Lorsque je répugnerais à croire que notre empire dans l’Inde n’a de stabilité que par l’épée, il est inutile de mettre en doute que notre domination doit surtout s’appuyer sur la puissance du conquérant et doit être maintenue par elle. Le gouvernement de l’Inde ne peut, d’une manière compatible avec sa propre sûreté, apparaître un seul jour dans une attitude d’infériorité, ou espérer de maintenir la paix ou la soumission parmi les princes et les populations innombrables répandus sur l’immense circonscription de l’empire, si pendant un seul jour il laisse mettre en doute la supériorité absolue de ses armes et de sa résolution continue de la soutenir. » (Livre-Bleu présenté au Parlement le 4 juin 1852, p. 66, cité dans le Westminster Review de juillet 1855, p. 35.)
  2. Dépêche de sir William Molesworth au gouverneur des îles Barbades.