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Telle est la théorie. Nous pouvons maintenant examiner ce qui se passe dans la pratique, en partant de cette théorie. « L’économie politique, dit le même auteur, considère l’espèce humaine comme occupée uniquement d’acquérir et de consommer la richesse, et elle cherche à démontrer quelle est la direction des efforts actifs vers laquelle elle serait poussée, vivant dans l’état de société, si ce motif, hormis dans la mesure où il est contrarié par les deux motifs contraires que nous avons signalés plus haut (la répugnance pour le travail et le désir de la jouissance actuelle de plaisirs coûteux) était le régulateur unique de toutes ses actions. Sous l’influence de ce désir, l’économie politique montre l’espèce humaine accumulant la richesse et employant cette richesse même à en produire de nouvelles, sanctionnant par un consentement réciproque l’institution de la propriété ; établissant des lois pour empêcher les individus d’empiéter sur les propriétés d’autrui par la force ou la fraude ; adoptant divers procédés pour accroître la productivité du travail ; plaçant enfin, d’un commun accord la division des produits sous l’influence de la concurrence… et employant certains expédients pour faciliter la répartition. Toutes ces opérations, bien qu’un grand nombre d’entre elles résultent réellement de plusieurs motifs, sont considérées par l’économie politique comme découlant uniquement du désir de la richesse… Non pas qu’aucun économiste ait été jamais assez absurde pour supposer que l’espèce humaine fût réellement ainsi constituée ; mais parce que c’est ainsi que la science doit être nécessairement étudiée[1]. »

« Dans un but d’utilité pratique, cependant, le principe des populations doit être nécessairement intercalé dans l’exposition ; et cela a lieu, bien qu’agir ainsi, implique, nous dit-on, le besoin de se départir de la stricte exactitude d’un système purement scientifique[2]. »

Cela fait, nous avons l’homme de l’économie politique, d’un côté influencé uniquement par la soif de la richesse, et de l’autre si complètement soumis à l’empire de l’appétit sexuel, qu’il est en tout temps disposé à s’y abandonner, à quelque degré que la satisfaction

  1. John Stuart Mill, ibid.
  2. Le même, ibid.