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l’Angleterre à prendre des mesures de résistance qui se firent jour dans l’acte de navigation de Cromwell, dans le droit de tonnage et le tarif promulgués par Colbert. A partir de cette époque, la puissance de la Hollande commença à s’éclipser, ainsi qu’avait déjà fait celle de Venise et de Gènes. Dans toutes ces circonstances, l’objet qu’on s’était proposé avait été d’empêcher la circulation au dehors, dans le but de produire une augmentation de mouvement à l’intérieur et de protéger la centralisation, en forçant le commerce d’acquitter des taxes extraordinaires sous la forme de transport, au bénéfice de ceux qui le taxaient ; et dans toutes ces circonstances, les résultats, ainsi que nous le voyons, se trouvèrent être les mêmes, — l’affaiblissement et la décadence, — lors même qu’ils n’aboutirent pas à la ruine absolue.

§ 7. — L’égoïsme, au sein des sociétés, de même que parmi les individus, se perd lui-même, généralement. Il vaudrait mieux pour l’homme que les forces naturelles n’existassent pas, plutôt que de voir leurs services monopolisés.

Parmi les individus, l’égoïsme en général se perd lui-même ; il en est de même à l’égard des nations. Toutes les sociétés que nous avons citées plus haut cherchaient à acquérir la force et la puissance, non pas en commun avec d’autres, — non pas en faisant avec d’autres un commerce basé sur l’extension du commerce parmi elles-mêmes, — mais en continuant le trafic pour les autres sociétés, dans le but de s’enrichir elles-mêmes aux dépens de celles-ci. Les droits naturels de toutes étaient égaux ; et si ce principe eût été pleinement reconnu, toutes auraient pu devenir riches, fortes et libres ensemble ; mais, de la façon dont les choses se comportaient, chacune d’elles appauvrit d’abord ses voisines plus faibles et se trouva, à son tour, appauvrie par les mesures mêmes auxquelles elle avait eu recours pour accroître sa richesse et sa puissance. La parfaite harmonie de tous les intérêts réels et l’avantage d’une parfaite moralité internationale sont des leçons que nous enseigne chaque page de l’histoire ; et cependant, après tant de siècles d’expérience, les premières nations du monde agissent, même aujourd’hui, comme si la route de la prospérité pour elles-mêmes ne devait s’ouvrir que par l’adoption de mesures tendant au détriment de toutes les nations qui les entourent.

Pour que le pouvoir de diriger les forces de la nature soit profitable à l’espèce humaine, il est indispensable que les connaissances à l’aide desquelles il est acquis soient répandues largement. Donnez à un membre seul d’une société le secret de la poudre à canon, et permettez-lui de le monopoliser, et il asservira ses voisins. Avec