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§ 3. — Anéantissement des manufactures indiennes. Ses effets désastreux.

Le coton était abondant, et, il y a cinquante ans, il faisait travailler dans une telle proportion les hommes, les femmes et les enfants, employés à le convertir en étoffes, que même, avec leurs machines imparfaites, non-seulement ils satisfaisaient les demandes à l’intérieur, pour les beaux tissus de Dacca et les produits grossiers de l’Inde occidentale, mais qu’ils exportaient dans les autres

    la propriété des rajahs, ils perçoivent toutes ces rentes comme un revenu public. Si nous recevions ce revenu dont jouissent aujourd’hui les rajahs, à titre de tribut, pour l’entretien d’établissements publics concentrés dans des sièges éloignés, tous ces établissements locaux seraient immédiatement désorganisés ; et toute la demande effective qu’ils satisfont, des produits bruts agricoles venant de districts agricoles éloignés, cesserait. Le prix des produits diminuerait en proportion, et avec lui la valeur foncière des districts situés aux alentours de ces chefs-lieux. De là, la folie des conquérants et des souverains, depuis le temps des Grecs et des Romains, jusqu’à celui de lord Hastings et de sir John Malcolm, qui tous étaient de mauvais économistes, lorsqu’ils supposaient que les territoires conquis et cédés pouvaient toujours devenir susceptibles de rapporter, à un État étranger, le même revenu brut qu’ils avaient payé à leur gouvernement national, quelle que fût leur situation par rapport aux marchés destinés à écouler leurs produits, quels que fussent l’état des arts et de l’industrie, la nature et l’étendue des établissements locaux situés au dehors. Les baux établis par rapport à l’impôt foncier, sur tous les territoires acquis dans l’Inde centrale pendant la guerre avec les Marattes, qui expirèrent en 1817, l’avaient été, d’après la supposition : que les terres continueraient à payer, sous le nouveau gouvernement, le même taux de rente que sous l’ancien, sans qu’aucune influence fût exercée par la réduction du nombre de tous les établissements locaux, civils et militaires, au dixième de ce qu’ils avaient été, qu’avec le nouvel ordre de choses toutes les terres en friche devaient être soumises à la culture, et pourraient rembourser un taux de rente aussi élevé qu’avant cette opération ; et que, conséquemment, l’ensemble du revenu net dont on pouvait profiter devait augmenter considérablement et rapidement. Ceux qui avaient à régir l’établissement de ces baux et le gouvernement de ces nouveaux territoires ne réfléchissaient pas que l’amoindrissement de chaque établissement était l’anéantissement d’un marché — d’une demande effective des produits de la terre ; et que, lorsque toutes les terres en friche seraient mises en culture, la totalité dégénérerait sous le rapport de la fertilité, par suite du défaut de mise en jachères, sous l’empire du système régnant d’agriculture, qui ne fournissait pas aux terres d’autres moyens de rénovation, par suite d’une récolte surabondante. Les baux pour l’impôt foncier qui avaient été conclus dans l’étendue de nos nouvelles acquisitions, d’après ces suppositions erronées, ne furent point, conséquemment, exécutés. Pendant une succession de baux quinquennaux, l’établissement de l’impôt avait été partout réduit, graduellement, environ aux deux tiers de ce qu’il était lorsque notre domination commença ; et à une somme moindre de moitié de ce que sir John Malcolm, et le digne marquis de Hastings lui-méme, avaient pensé qu’il rendrait, d’après leurs propres opinions. Les revenus fonciers des princes indigènes de l’Inde centrale, qui réduisirent le nombre de leurs établissements publics, que le nouvel ordre de choses semblait rendre inutiles, et diminuèrent