Page:Carey - Principes de la science sociale, Tome 1.djvu/392

Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

denrées haussent de prix, et l’on s’efforce, par tous les moyens possibles, d’engager à faire d’immenses chargements de matières premières. L’instant qui suit, on dit que l’argent est rare et les expéditeurs sont ruinés.

On peut voir partout en Turquie, les ruines de villages autrefois florissants, et les résultats de cette diminution dans la force d’attraction locale se révèlent dans la décadence générale de l’agriculture. La charrue, le pressoir et le moulin à huile, qu’on met en œuvre aujourd’hui, sont tous également d’une construction barbare. Les champs de coton de la Thessalie restent incultes ; il n’existe aucune terre cultivée dont on puisse parler dans un espace de vingt milles, et de cinquante milles, en suivant certaines directions. Les choses les plus nécessaires à la vie viennent de points éloignés ; le blé nécessaire au pain de chaque jour, d’Odessa ; le gros bétail et les moutons, d’endroits situés au-delà d’Andrinople, ou de l’Asie mineure ; le riz, dont il se fait une consommation si considérable, des environs de Philippopolis (Filèbe) la volaille, principalement de la Bulgarie, les fruits et les légumes, de Nicomédie et de Mondanie (Mondania). C’est ainsi qu’il y a épuisement constant du numéraire sans qu’il y ait aucun revenu évident, si ce n’est pour le trésor, ou provenant de la propriété de l’Uléma[1].

Il faut maintenant que la soie fabriquée, — mal apprêtée à cause de la difficulté de se procurer de bonnes machines, — arrive en Angleterre à son état le plus grossier pour y subir une préparation et être expédiée en Perse ; et c’est ainsi que le commerce avec les nations étrangères diminue, en même temps que le pouvoir de maintenir le commerce à l’intérieur.

Non-seulement l’étranger est libre d’introduire ses marchandises ; mais il peut, en payant un droit insignifiant de 2 %, les transporter dans toute l’étendue de l’empire, jusqu’à ce qu’il les ait vendues complètement. Voyageant à la suite de caravanes, il est logé gratuitement. Il apporte ses marchandises pour les échanger contre du numéraire, ou toute autre chose dont il a besoin, et l’échange accompli, il disparaît aussi subitement qu’il est venu. Comme résultat nécessaire de cette complète liberté du trafic, il arrive que le commerce local n’existe en aucune façon ; le marchand,

  1. Voyages de Slade, en Turquie, II, p. 143.