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acre de terre, dans le voisinage de Londres, se vend mille dollars, tandis qu’une acre d’une qualité exactement identique peut s’acheter dans l’Iowa ou le Wisconsin pour un peu plus d’un dollar. Le propriétaire du premier terrain jouit de l’immense avantage du mouvement illimité de ses produits ; il tire de ce terrain plusieurs récoltes dans l’année, et il lui restitue immédiatement une quantité d’engrais égale à tout ce qu’il lui avait enlevé ; et c’est ainsi que chaque année il améliore sa terre. Il fabrique une machine, tandis que son concurrent de l’Ouest, forcé de perdre l’engrais, en détruit une. N’ayant point de transport à payer, le premier peut faire naître ces produits que la terre fournit libéralement, tels que les pommes de terre, les carottes ou les navets, ou ceux dont la nature délicate empêche qu’on ne les transporte à un marché éloigné ; et c’est ainsi qu’il obtient une ample récompense pour cette continuelle application de ses facultés qui résulte du pouvoir de s’associer avec ses semblables.

A l’égard du second, tout se passe bien différemment. Ayant à payer de lourds frais de transport, il ne peut faire pousser des pommes de terre, des navets ou du fourrage, parce que la terre fournit ces produits par tonnes, et que, conséquemment, ils se trouveraient presque complètement, sinon tout à fait absorbés dans le parcours de la route qui conduit au marché, Il peut produire du blé que la terre donne par boisseaux, ou du coton qu’elle donne par livres ; mais s’il produit même du maïs, il doit, de ce maïs, faire un porc, avant que les frais de transport soient diminués dans une assez notable proportion, pour lui permettre d’obtenir une rémunération suffisante en échange de son travail. Les cultures successives étant donc pour lui chose inconnue, il ne peut y avoir continuité de mouvement, soit en ce qui le concerne lui-même, soit à l’égard de sa terre. Son blé n’occupe celle-ci qu’une partie de l’année, en même temps que la nécessité de renouveler le sol au moyen de jachères, fait qu’une portion considérable de sa ferme reste complètement improductive, bien que les frais nécessaires pour entretenir les routes et les haies soient exactement les mêmes que si toutes les portions étaient complètement employées.

L’emploi de son temps n’étant également nécessaire que pendant certaines parties de l’année, une part considérable de ce temps se trouve complètement perdue, comme celui pendant lequel il em-