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À défaut d’observations positives, des hommes adonnés aux spéculations de la pensée regardèrent au dedans d’eux-mêmes et inventèrent des théories qui furent présentées au monde comme des lois ; mais ainsi qu’on l’a dit avec beaucoup de raison, « l’homme ne peut trouver, en matière de science et de religion, que des choses fausses, et toutes les vérités qu’il découvre ne sont que des faits ou des lois qui émanent du Créateur. » Les hommes du moyen âge, les philosophes des écoles enseignaient des théories qui avaient été découvertes par les Grecs, leurs devanciers, et il était réservé à Bacon d’enseigner cette philosophie qui amène à rechercher la vérité au sein même des faits naturels et non des idées spéculatives des hommes. Depuis l’époque où vivait Bacon jusqu’à nos jours, il y a eu tendance perpétuelle à substituer des observations et des inductions scrupuleuses aux rêves des théoriciens ; de même que la doctrine cartésienne des tourbillons avait disparu devant la découverte de la gravitation, de même le phlogistique imaginaire de Stahl et les cosmogonies plutonienne et neptunienne ont cédé la place aux découvertes de la science moderne. L’un, depuis longtemps, a été remplacé par l’oxygène de Lavoisier, et les autres n’ont pu se maintenir aussitôt qu’elles ont été réfutées par les observations des géologues, dont la branche de science ne remonte guère au delà du siècle actuel.

En physique, ainsi que cela a eu lieu partout, la partie la plus abstraite et la plus générale a précédé, dans son développement, la partie concrète et spéciale. L’astronomie, ou la science des lois qui régissent les corps extérieurs à notre planète, fut étudiée à une époque très-reculée ; les pâtres de la Chaldée avaient observé avec soin les mouvements des corps célestes, et les Babyloniens avaient calculé les éclipses, des milliers d’années avant l’ère chrétienne. Le puits de Syène fournit à Ératosthène les observations nécessaires pour déterminer le méridien terrestre ; et bien des siècles avant Copernic, Archimède enseignait le double mouvement que la terre accomplit autour de son axe et autour du soleil. La durée précise de l’année solaire avait été déterminée par Hipparque, en même temps que les observations faites par les Mexicains et celles des Étrusques conduisaient, à cet égard, si près du même résultat que la différence entre les uns et les autres n’était que de 10 minutes.