n’étaient que des trafiquants. Brutus prêtait de l’argent à quatre pour cent par mois, et César aurait probablement payé un intérêt encore plus élevé pour les millions qu’il avait empruntés, s’il eût réussi à monter sur le trône impérial. Tous faisaient le trafic des esclaves, se réservant le monopole des produits du travail de ces malheureux soumis à leur pouvoir, et qu’ils traitaient de la façon la plus inhumaine.
Si maintenant nous tournons nos regards vers Venise, nous assisterons à une succession non interrompue de guerres entreprises en vue du trafic, et qui tendaient constamment à centraliser le pouvoir entre les mains d’un petit nombre d’hommes que le hasard de la naissance ou de la fortune, avait placés à la tète de l’État pour le diriger. Démocratique, à l’origine, nous voyons son gouvernement devenir d’âge en âge plus aristocratique, jusqu’à ce qu’enfin nous arrivions à l’époque de la dissolution du Grand Conseil, mesure dirigée contre tous ceux qui n’en avaient pas encore fait partie[1]. Elle fut suivie de l’établissement du fameux Conseil des Dix, dont les espions pénétraient dans toutes les maisons, dont les supplices pouvaient atteindre tout individu quelque élevé que fût son rang, et dont l’existence même était complètement incompatible avec rien qui pût se rapprocher de la liberté du commerce. Dans la suite de son histoire, nous trouvons toujours Venise cherchant à établir son trafic, au moyen de son intervention militaire pour entraver le mouvement des autres peuples, et conquérant des colonies qui seront administrées uniquement au profit de son aristocratie trafiquante, frappant d’impôts ses sujets éloignés au point de faire renaître constamment une suite de tentatives de révolutions, dont la répression exige des flottes et des armées considérables ; et de cette manière, élevant la classe qui vivait de l’appropriation du bien d’autrui, en même temps qu’elle empêchait tout mouvement tendant au développement de l’indi-
- ↑ En 1286.
cette période, cependant, que les grandes propriétés se consolidaient partout, qu'on ne trouvait plus de citoyens libres, que le nombre des esclaves augmentait très-rapidement ; qu'on introduisait les combats de gladiateurs, que la démoralisation se répandait avec la plus grande rapidité parmi le peuple, et que les grands de Rome élevaient dans la ville et hors de la ville les plus vastes palais, toutes choses qui prouvent le déclin de la condition sociale.