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s’éloignant invariablement des bords de la rivière. La ville de ce nom est située à une distance de vingt milles, même de l’affluent tributaire du grand fleuve, et à plus de cent milles de l’embouchure du petit cours d’eau. En passant à l’ouest, de Monterrey à Saltillo et de là au sud, le voyageur cheminera à travers des plaines sablonneuses, dont l’existence est une preuve de la nature générale du pays. Arrivé au Potosi, il se trouve au milieu d’une contrée sans rivière, où l’irrigation est presque impossible, et dans laquelle, toutes les fois que viennent à manquer les pluies périodiques, sévissent la famine et la mort ; cependant s’il jette les yeux vers la côte, il aperçoit un pays arrosé par de nombreuses rivières, où le coton et l’indigo croissent spontanément ; où le maïs pousse avec une exubérance de végétation inconnue partout ailleurs ; un pays qui pourrait approvisionner de sucre le monde entier, et où le seul danger à redouter, à cause de la nature du sol, c’est de voir les récoltes étouffées, à raison du rapide développement des plantes qui surgissent sur une terre féconde, sans l’assistance, et même contre la volonté de l’homme qui entreprendrait de les cultiver ; mais on n’y aperçoit point de population. Le terrain n’est ni cultivé, ni desséché, et demeurera probablement tel qu’on le voit aujourd’hui ; en effet, ceux qui entreprendraient cette double tâche avec les ressources dont le pays dispose actuellement, mourraient de faim, s’ils étaient épargnés par les fièvres qui, là comme partout, règnent sur les terres plus fertiles, jusqu’au moment où celles-ci auront été soumises à la culture[1].

  1. La plaine étroite qui s’étend le long de la côte (tels sont les termes dont se sert Murray dans son Encyclopédie géographique, à l’article Mexique) est un espace de terrain où les plus riches productions des tropiques croissent avec une exubérance à laquelle on ne peut guère rien comparer. Et cependant, tandis que la végétation du climat est si riche et se développe sous des formes magnifiques et gigantesques, elle est presque infailliblement funeste à la vie animale ; deux résultats qui, suivant Humboldt, sont pour ainsi dire inséparables dans ce climat. Les Espagnols, épouvantés par cette atmosphère pestilentielle, « n’ont fait de cette plaine qu’un passage pour arriver à des districts situés dans des lieux plus élevés, où les Indiens indigènes aiment mieux soutenir leur existence par de pénibles travaux de culture que de descendre dans les plaines, où tout ce qui contribue au bien-être de la vie se trouve libéralement et spontanément prodigué par la nature. — Dans toute l’étendue du Mexique et du Pérou, les traces d’une civilisation avancée sont confinées sur les plateaux élevés. Nous avons vu, sur le sommet des Andes, les ruines de palais et de thermes à des hauteurs variant entre 1.600 et 1.800 toises {10.230 à 11.510 pieds anglais). Humbolt.