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qu’elles avaient déjà lu ailleurs, et présenté sans reconnaître un pareil fait, ces personnes seraient, tout naturellement disposées à soupçonner l’auteur actuel de s’être déloyalement approprié le bien d’autrui, bien qu’en réalité, il fût lui-même le propriétaire véritable. Ce serait pour lui une situation pénible et il estime que le seul moyen d’y échapper, est de tracer, en cette circonstance, une courte esquisse des phases successives dans lesquelles ont été découvertes les idées nouvelles renfermées dans les pages suivantes.

La théorie de la valeur, telle que nous la présentons aujourd’hui, parut, pour la première fois, en 1837. Cette théorie étant très-simple, était, en même temps, très-large ; elle embrassait toutes les denrées ou toutes les choses auxquelles pouvaient s’appliquer l’idée de valeur, la terre, le travail, ou leurs divers produits. C’était un pas de fait vers la généralisation des lois naturelles, la valeur du sol ayant été attribuée jusque-là, par tous les économistes, à des causes énormément différentes de celles qui la communiquaient à ses produits[1].

  1. « Carey et après lui Bastiat ont inauguré une formule, à posteriori, que je crois destinée à être généralement adoptée ; et il est très-regrettable que le dernier se soit borné à ne l’indiquer que d’une façon incidente, au lieu de lui reconnaître toute l’importance que le premier lui a donnée à si juste titre. Lorsqu’on apprécie l’équilibre entre le coût d’une denrée pour soi-même et son utilité pour ses semblables, il peut intervenir mille circonstances ; et il est désirable de savoir s’il n’existe pas parmi les hommes, une loi, un principe d’une application universelle. L’offre et la demande, la rareté, l’abondance, etc., sont toutes, à cet égard, des considérations insuffisantes et sujettes à de continuelles exceptions. Carey a remarqué, et avec une grande sagacité, que cette loi est le travail épargné, le prix de reproduction, idée que je considère comme très-heureuse. Il me semble qu’il ne peut surgir aucun cas où l’homme ne soit décidé à faire un échange et dans lequel, en même temps, cette loi ne trouve son application. Je ne donnerai point une certaine quantité de travail ou de peine matérielle, si l’on ne m’offre, en échange, une utilité équivalente ; et je ne regarderai point cette utilité comme équivalente, si je n’aperçois qu’elle m’arrive, en me coûtant moins de travail qu’il