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À un jurisconsulte, qui me reprochait le petit nombre de mes élèves, je répondis : la présence de quelques élèves fait honneur ; le départ d’un certain nombre d’entre eux est un sujet de honte.

À quelqu’un qui se vantait d’avoir beaucoup de malades, je répondis : ce n’est pas cela qui importe, mais si beaucoup d’eux sont guéris. À d’autres j’ai dit plus durement : c’est une grande honte qu’il y en ait tant qui meurent entre vos mains.

(289) Pour éloigner un jeune homme de la fréquentation de malhonnêtes gens, je lui dis : je te montrerai un fruit qui a gâté tout un tas ; tu ne pourras pas me montrer un tas de fruits qui en ait guéri un gâté.

À ceux qui me reprochaient d’entretenir beaucoup de jeunes domestiques, je répondis : j’ai double mérite ; je fais une bonne action et j’en tire mauvaise réputation.

La sagesse comme les autres matières précieuses, doit être arrachée aux entrailles de la terre.

À quelqu’un qui me comparaît à d’autres savants, j’opposai ce vers de Virgile : « Et quoi ! puisqu’il disputerait la palme du chant à Phébus lui-même ».

J’ai souvent engagé à réfléchir profondément sur le seul point : Qu’est-ce qui est plus important ? Qu’est-ce qui l’est moins ?

C’est une grande preuve de sagesse que d’avoir un ami éminent.

À quelqu’un qui me reprochait ma vieillesse : il n’y a de vieillard que celui qui est abandonné de Dieu.

Les amis apportent un secours dans l’adversité, les flatteurs un conseil.

Il faut soigner le mal par le bien, non par le mal.

Je sais que les âmes sont immortelles, je ne sais pas comment.

(290) Je dois plus aux mauvais médecins, parce qu’ils causent la perte de mes ennemis, qu’aux bons quand même ils sont mes amis.

Comme on me reprochait les erreurs de mes pronostics du temps où je me trouvais au milieu de méchants et d’incapables, je dis : Il aurait été étonnant que parmi de telles gens je pusse prédire correctement ou faire bien quelque autre chose.

Sur le point de faire une chose, réfléchis à l’état où tu te trouveras quand tu l’auras faite, qu’elle réussisse ou non.

Un homme remarquable doit vivre où vit le prince.

Reçois tes amis avec un visage riant, ils le méritent ; tes ennemis