le roulement des lourdes charrettes de maraîchers ou le tressautement précipité et le sonore appel d’une trompe d’automobile… Quelquefois un souffle froid, humide, qui sifflait entre les volets, poussait sur eux la pluie et jetait, contre le trottoir, l’ombre tourbillonnante d’un réverbère. L’homme n’entendait et ne voyait pas autre chose. La rue était déserte. Rien n’y bougeait… Rien n’y circulait que le vent et, par instants, encore, le vent s’arrêtait de souffler et la pluie, seule, tombait très droite, silencieuse, serrée, indifférente comme si, du fond des âges, elle eût choisi, pour y ensevelir sa chute, cette rue banale et endormie.
À l’écouter glisser du ciel, sans troubler le silence. Lampieur perdait peu à peu tout contrôle sur lui-même et une appréhension, qui était née de son désir de revoir Léontine et de l’attente qu’elle décevait, l’empêchait de se rappeler la raison pour laquelle il était là, debout, derrière les volets clos de la boutique et tendu jusqu’à l’âme vers il ne savait plus quoi de réel ou d’incertain… Sans doute un but précis restait le sien et Lampieur ne désespérait