tant de nuits de printemps, méprisé de boire pour caresser une enfant amoureuse. On bâtira. L’énorme construction du Sacré-Cœur écrasera la petite église bourguignonne pourrie de vieillesse. Je connais des bars si retirés qu’on oublie Paris en s’y arrêtant, des salles basses de plafond, accueillantes et fraîches, des cabarets, des ateliers et de pauvres chambres de camarades où l’on pouvait discuter sans s’occuper des femmes. N’est-il pas autre chose ? Cet air de liberté méchante et querelleuse ne m’a-t-il pas toujours énivré ? On s’asseyait à une table, on écoutait ceux qui parlaient : on n’admettait jamais une idée sans l’attaquer un peu. Il y avait de bonnes natures qui cherchaient à ne froisser personne. Quel mépris nous avions alors ! On a toujours raison d’assassiner les faibles. Mais ceux qui, durement, voulaient nous blesser par un mot ou par une attitude, comme on les regardait en face. L’alcool nous excitait. Dehors, dans la nuit heureuse, nous ne désarmions pas et c’était au plus fort.
Chers ennemis d’une heure ou de toujours ! Nous regretterons plus tard les mêmes émotions. Le parc de la Belle Gabrielle élève sur un ciel ouaté de brouillards les hautes cimes dépouillées de ses arbres. Retrouverons-nous jamais, après la terrasse, l’herbe folle du jardin, les espaliers, le lierre et les murs éventrés ? Goûterons-nous encore, par les après-midi pluvieuses de mars, les baisers d’une amie inconstante, ses rires et l’insouciance de notre cœur ? Ah ! je voudrais effacer de ma vie cette jeunesse aventureuse qui me tente encore. Je voudrais ne me rappeler rien. Ma