Page:Capus – Qui perd gagne.djvu/257

Cette page a été validée par deux contributeurs.

dant, écris-moi par le retour du courrier. Nous causerons de nos affaires de vive voix. » Il lui recommandait aussi de ne tenter aucune démarche chez ses amis.

Elle lui répondit :

« Mon chéri,

« Va, je ne t’en veux pas du malheur qui nous arrive et je me fais plus de chagrin pour toi que pour moi. Je ne souhaite qu’une chose, c’est que tu n’aies pas trop de peine. Je t’aime toujours, mon chéri. J’irai demain demander au juge d’instruction l’autorisation de te voir à Mazas. Tu m’expliqueras bien dans quelle position nous sommes, afin que nous puissions prendre un parti. On est venu mettre les scellés ici et à ton bureau. Je suis triste d’être toute seule, mais je pense à toi et je t’aime bien. Je t’embrasse, mon petit chéri.

Ta femme,                         Emma. »

— C’est aujourd’hui jeudi, se dit Emma. J’aurai l’autorisation demain et je le verrai dimanche.

Elle descendit mettre la lettre à la poste, elle-même, afin que la bonne ne vît pas l’adresse : Prison de Mazas. Au coin de la rue Taitbout et du boulevard, elle crut reconnaître la tournure d’un monsieur qui parlait à un commissionnaire. Elle allait s’éloigner, mais le monsieur leva les yeux et leurs regards se croisèrent. C’était Paul Velard. Il fit un pas en avant ; elle qui, les rares fois où par hasard ils se rencontraient, feignait de ne pas le voir, fut prise cette fois d’une émotion soudaine et, une seconde, instinctivement, s’arrêta. Alors, Velard quitta le commissionnaire et se trouva devant elle. Il ôta son chapeau. Emma balbutia : « Bonsoir, monsieur. » Velard, d’une voix timide, répondit :