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faire des économies, quatre mille francs. Et quatre mille francs qu’il m’a donnés quand il s’est marié, ça fait huit mille. Je ne l’ai pas trompé, parce que les difficultés dans l’existence, ça m’ennuie. Alors, j’ai pris cette boutique pour m’occuper, et voilà un an que ça marche.

— Et depuis le chef de bureau, Madame ? Rien ?… demanda une des ouvrières.

La patronne réfléchit un instant.

— Rien, jusqu’à il y a huit jours.

— Le monsieur du quinze, un brun ! s’écria Joséphine.

— Monsieur Farjolle ! Je l’avais deviné, dit une autre.

Elle avoua sans réticences.

— Oui, M. Farjolle, M. René Farjolle… Je me suis laissée aller.

— Il est très gai, fit remarquer Joséphine, et il a l’air d’un bon garçon.

— Maintenant, bonsoir, mes enfants. Mon amoureux va venir : c’est son heure. Il faut fermer la boutique.

Au début de leur liaison, Farjolle arrivait vers dix heures du soir et il couchait dans la chambre de la patronne, située à l’entresol au fond de la cour. Il s’en allait le matin avant déjeuner pour surveiller quelques clients, mettre en train des affaires, voir des camarades dans un café de la rue Montmartre. Ils couchaient parfois chez lui à l’hôtel et, alors, Emma réparait un peu le désordre de son installation sommaire de garni, cousait des boutons à ses vêtements, enlevait des taches.

Ils se plaisaient l’un à l’autre beaucoup et n’avaient pas, au courant de leurs nuits communes, une minute