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preinte de considération et ne le « débinait » pas, entre camarades. Ce rare patronage ferma la bouche aux malveillants.

Il passa, dans son métier, pour un garçon sérieux, menant une existence régulière, et sur qui on pouvait compter. Sa tenue, d’une correction parfaite, contrastait avec les façons débraillées et insolentes de beaucoup de ses collègues ; son air bourgeois inspirait confiance aux clients.

« Farjolle, commençait-on à dire, fera mieux que de la publicité ; soyez sûrs qu’il entreprendra un jour quelque grande affaire. Il a de l’étoffe, ce n’est pas un vulgaire carottier. »

Il allait maintenant, avec sa femme, à toutes les premières de quelque importance, dans la loge de Verugna ou dans celle de Moussac, car ces deux personnages lui témoignaient une égale affection. Velard, au cours de la représentation, venait les retrouver. Emma et lui échangeaient le regard rapide et plein de mystère des amants.

Farjolle, complètement insensible aux choses du théâtre, s’ennuyait dès que le rideau se levait. Quand ses voisins applaudissaient, il applaudissait aussi, machinalement ; et si l’on chuchotait, à son côté, l’éloge d’une artiste, il répondait :

— Charmante, oui, charmante.

Il lui eût semblé déraisonnable et extravagant de ne pas être de l’avis des personnes les plus rapprochées de lui.

Durant l’entr’acte, dans ces couloirs bruyants de premières où les Parisiens d’élite se réunissent périodiquement pour se serrer la main, Farjolle reprenait son