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— Quel service ! Tu oublies que j’ai été son témoin contre Brasier : sans moi, il aurait été sûrement obligé d’aller sur le terrain, et un duel, dans sa position, quand on n’a pas de temps à perdre, ce n’est pas amusant.

— En effet, dit Emma, tu lui as rendu là un service important : il t’en est reconnaissant, ce n’est que juste. Allons faire ta valise, mon chéri.

— N’oublie pas mon habit. À Londres, on se met en habit tous les soirs.

D’aller en Angleterre pour gagner de l’argent, Farjolle éprouvait une certaine fierté. Le voyage lui semblait une expédition dangereuse, une de ces entreprises décisives qui comptent dans une existence. Il fallait traverser la mer, s’exposer, lutter, conquérir. Justement, il savait un peu d’anglais et il vit dans cette circonstance comme une indication du Destin.

— Je vais gagner quinze mille francs et peut-être davantage. Dans quel métier gagne-t-on quinze mille francs d’un seul coup !

Emma était surprise de l’importance de ce chiffre et lui demanda quel intérêt pouvait avoir ce Griffith, — elle prononça mal et Farjolle rectifia d’un air grave, — quel intérêt pouvait-il avoir à distribuer une pareille somme à lui et à Velard.

— Tu ne comprends pas ce genre d’affaires, ma chérie, ce n’est pas de ta faute. Sache qu’il faut traiter avec tous les journaux de Paris, pour la publicité, payer une foule d’articles de réclame, lancer l’affaire, quoi ! Il y a à Paris, autour des journaux, des milliers de gens qui sont à l’affût et ne vivent que de ces hasards-là. À mon retour, je vais être assailli… Griffith sera forcé de