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Nous voyagerons nuit et jour, et, s’il faut nous reposer quelques instants, la consigne ordonne de choisir des relais isolés.

J’ai envoyé chez M. de Tourdonnet. Des affaires l’ont retenu à la campagne. Il ne sait rien des ordres qui viennent d’arriver. Ne pourrai-je pas revoir une dernière fois ce premier ami de mon infortune ? Ne pourrai-je pas lui dire adieu, avant qu’on ait muré sur moi la porte de ma prison ?… Son absence ajoute un deuil à tous mes deuils. J’aurais voulu poser un baiser, une larme, sur le front de ses beaux petits enfants. J’aurais voulu saluer d’un dernier merci la noble amitié et le pieux dévouement de madame de Tourdonnet !

Un exprès est parti immédiatement pour le château de Saint-Martin. Arrivera-t-il à temps ?


VII

Quelle journée aujourd’hui ! Quelle journée demain ! Quelle vie à subir, ô mon Dieu ! jusqu’à l’heure où il vous plaira de me rappeler à vous !

Je suis comme une trépassée qui assisterait, pauvre âme en peine, aux apprêts de son convoi. Depuis ce matin, j’écoute, je réponds, je tends la main machinalement. Mou front est brûlant, mais je ne pense pas ; mon cœur bat, mais dans le vide ; mes sanglots m’étouffent, mais je ne pleure pas. Je ne serais plus sûre de vivre, si je n’étais certaine de souffrir.


VIII

J’ai eu plus de courage ce soir. Mes amis partis, j’ai écrit quelques notes, et, laissant ma bonne Clé s’occuper des préparatifs du lendemain, je me suis mise à glaner