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saisie. J’aurais voulu parler, et je n’osais. J’étais impatiente d’apprendre ce que je tremblais de savoir. Je sentais que ma voix s’éteindrait dans mes sanglots… J’ai pris alors un bouquet de roses sauvages que la fille de la concierge m’avait apporté le matin, et je l’ai lentement dépouillé, fleurs, feuilles, tiges…

M. Lachaud a compris ma pensée. Il a détourné la tête. Au même instant le gardien chef est venu demander Clémentine, et j’ai entendu murmurer ces mots terribles : « Voiture cellulaire… »

Heureux les morts !


II

On ne me dit rien, et je n’ai la force de rien demander. On va, on vient, on cause bas autour de moi. On comprend qu’il n’est plus possible de me tromper, et cependant chacun s’efforce de mettre un faux sourire sur ses lèvres…

Pauvres amis ! demain, s’il faut que je vous quitte, vous me pleurerez comme on pleure une morte, et puis…


III

Clémentine est au désespoir. Elle me voit déjà seule, évanouie, sans secours, dans une de ces cages de fer du chariot cellulaire : cercueil ambulant où la loi jette ses morts, pour les envoyer perdre dans la tombe commune d’une prison.

La mort, qui ne m’a jamais effrayée, m’effraye cette fois… Si je succombe dans l’horrible trajet, il faudra donc qu’un homme inconnu, grossier, indiscret peut-être, prenne la place de l’homme de Dieu, et du saint entourage des mourants !… Ce sera la main d’un garde-chiourme qui se