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un instant de répit, ni le jour ni la nuit… J’ai lutté sans succès, et je sens que je mourrai si je résiste à la voix puissante qui m’appelle, et cette voix, mes bons amis, c’est celle de la patrie !

Le père et la mère Kelly pleuraient.

Ah ! c’est qu’ils connaissaient, eux aussi, pour l’avoir ressenti autrefois, l’acuité de ce mal épouvantable… Ils s’étaient exilés de leur pays pour fuir la persécution, mais l’Irlande, la verte Erin, était toujours la patrie de leur cœur ! Et bien des fois, par la pensée, ils s’étaient transportés au village natal pour revivre les jours heureux de leur jeunesse !

Mais Dieu, sur le sol américain, avait adouci l’amertume de leur exil en leur envoyant des enfants — ces doux anges du foyer — dont la vue seule suffit à faire oublier la patrie absente ! Et ils s’étaient attachés à leur patrie d’adoption, puisqu’elle était le berceau et par conséquent la patrie réelle de leurs chers enfants.

Mais Jean-Charles, lui, était seul, seul avec ses douleurs, sur la terre étrangère ! Et jamais cette terre, si hospitalière, ne pouvait remplacer le sol natal…

La séparation fut cruelle.

— Aurons-nous le bonheur de vous revoir ou au moins de recevoir de vos nouvelles ? demanda le vieux fermier.