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les deux veufs, je dis à mon tour : bonsoir, la compagnie ! et j’allai me coucher…

« J’ai compris que mon rôle était fini… ni… ni ! Je remercie mon fouet, pardon ! je vous remercie, pardon encore ! je remercie la Providence (oui, c’est ça !) je remercie la Providence, dis-je, d’avoir fait germer dans ma caboche l’idée de me costumer en fantôme et de m’armer d’un fouet pour faire danser le muscadin ! Je ne sais pas si c’est mon apparence de fantôme ou les coups de fouet qui l’ont effrayé, mais dans tous les cas, je suis certain que c’est l’un ou l’autre, et peut-être les deux !

« À dire la vérité, ça me faisait de la peine de le fouetter comme je l’ai fait — moi qui ne voudrais pas faire de mal à une mouche ! — mais j’avais souvent entendu dire qu’aux grands maux il fallait employer les grands remèdes ; et, comme je ne tiens pas dans mon écurie une boutique de remèdes, j’ai pris celui que j’avais sous la main, c’est-à-dire mon plus grand fouet, et j’ai tapé, babiche ! oui, j’ai tapé !

« Mais remarquez bien que je n’ai frappé le muscadin que sur les jambes, car si je l’avais frappé sur le cou, je lui aurais tranché la tête comme à un pissenlit… et si je lui avais cinglé le corps, je l’aurais coupé en plusieurs bouts comme une anguille…