Et ces feuillets, épars à travers les cités,
Tels que le grain qu’on verse aux sillons de la plaine,
Firent naître et grandir par les foules humaines
Un rêve de justice et de fraternité.
Les temps sont écoulés. Les nations esclaves
Se révoltant un jour, ont rompu leurs entraves
Et de leur trône d’or précipité les rois,
Gravant sur les palais ce mot sacré : la loi.
Sur les lignes de fer, à l’aube, étincelantes,
Glissèrent en hurlant les machines géantes,
Portant le blé, la houille et les hommes hardis,
Et, de la nuit polaire ou soleil du midi,
Au long des fils légers qui tremblent par les plaines,
S’élança la pensée, et la voix très lointaine
D’un voyageur absent vibra jusqu’à l’ami.
Chaque jour, dominant les éléments soumis,
Transmettant par le livre à la race nouvelle
Un secret de sa force, ainsi qu’une étincelle
Du fou qu’aux immortels avait ravi Japhet,
L’humanité, sous le ciel large, triomphait…
Or, j’ai songé : ceux-là, qui de leurs mains fécondes
Font le livre, versant jusqu’aux confins du monde
Aux frères inconnus l’esprit libérateur,
Ceux-là, du moins, sont-ils appelés bienfaiteurs ?
Page:Canora - Poèmes, 1905.djvu/221
Cette page a été validée par deux contributeurs.
216
vers l’humanité