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la splendeur d’aimer



Et je songe au destin d’implacable souffrance
Qui nous fera, tous deux, pleurer ce soir encor,
Séparés et perdus dans le tiède silence,
Tandis que, par la nuit d’ivresse qui commence,
Les époux mêleront leurs âmes et leurs corps…


Hélas que de fois, souriante et belle,
Pour lire en mes yeux leurs rêves secrets,
Tu parus, portant des roses nouvelles,
Au seuil de l’asile où je t’espérais,
Et, jusqu’à la nuit, laissant mes caresses
Errer mollement dans tes lourdes tresses,
Tu te crus à moi ! Puis quand tes yeux clos
Sentirent le feu des baisers farouches,
Pale tu t’enfuis, m’arrachant ta bouche,
M’arrachant ton cœur brisé de sanglots :


Que de fois aussi, tout de blanc parée,
De jaunes œillets dans tes noirs cheveux,
Je te vis danser, muette, enivrée,
Ton cœur à mon cœur, tes yeux à mes yeux,
Et quand les flambeaux de l’ardente fête
Pâlirent au jour, tu penchas la tête,
N’osant murmurer qu’il fallait partir,
Un autre que moi te prit sous sa garde,