Page:Campan - Mémoires sur la vie privée de Marie-Antoinette, tome 3.djvu/75

Cette page a été validée par deux contributeurs.

souvent à la duchesse l’honneur de passer la soirée et de souper chez elle ; le président Hénault faisait le charme de cette pieuse et vertueuse société. Ce magistrat unissait aux qualités imposantes de son état, le savoir d’un homme de lettres et l’aménité du courtisan[1]. La reine surprit un jour la du-

    Plusieurs amis du dauphin venaient en particulier voir Madame, excepté le chevalier Du Muy ; et quelques-uns obtinrent des grades. Le roi avait pour eux le plus grand mépris et ne leur accordait rien qu’en rechignant.

    » Ce moment est celui où j’ai vu Madame le plus satisfaite. Les dévotes venaient chez elle sans scrupule et ne s’oubliaient pas dans l’occasion. Madame de Luynes avait donné l’exemple. Le docteur Quesnay riait de ce changement de décoration et s’égayait aux dépens des dévotes. « Cependant, lui disais-je, elles sont conséquentes et peuvent être de bonne foi. — Oui, disait-il, mais il ne faut pas qu’elles demandent rien. » (Journal de madame du Hausset.)

    (Note de l’édit.)

  1. Le président Hénault, qui ne voulait pas être fameux par ses soupers, mais qui l’est, à bien plus juste titre, par sa Chronologie, était surintendant de la maison de la reine. Il faisait le charme de sa société intime, comme il avait été dans sa jeunesse l’ornement de la cour de Sceaux, chez la duchesse du Maine. On a de lui des couplets, des pièces de théâtre, et même une tragédie de Marius, jouée avec quelque succès en 1715. Mais ses tragédies sont au-dessous de ses chansons ; et le président Hénault n’eût laissé que les souvenirs d’un homme aimable, sans la juste célébrité que l’Abrégé chronologique assure à l’écrivain.
    (Note de l’édit.)