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La reine avait choisi pour amis particuliers le duc, la duchesse et le bon cardinal de Luynes. Elle les appelait ses honnêtes gens[1] ; elle faisait

    sur le scandale qu’elle lui donnait avec son imprimerie clandestine. La reine lui fit présent d’une collection des ouvrages sortis de sa presse, et lui demanda s’il ne serait pas curieux d’apprendre le métier à son école ? « Pas du tout, répondit le prince ; à moins que ce ne soit pour imprimer un règlement bien sévère contre l’abus qu’on fait aujourd’hui de l’imprimerie. »

    (Note de l’édit.)

  1. Je ne prétends affaiblir en rien le sens de l’honorable épithète donnée par la reine à ses amis ; mais la fidélité de l’histoire m’oblige à rapporter le passage suivant des Mémoires de madame du Hausset.

    « J’étais surprise, dit-elle, de voir depuis quelque temps la duchesse de Luynes, dame d’honneur de la reine, venir en secret chez Madame. Ensuite elle y vint sans se cacher ; et, un soir, Madame s’étant mise au lit, me dit : « Ma chère bonne, vous allez être bien contente, la reine me donne une place de dame du palais ; demain je lui serai présentée : il faut me faire bien belle. » J’ai su que le roi n’était pas aussi aise qu’elle ; il craignait le scandale, et qu’on ne crût qu’il avait forcé la reine à cette nomination. Mais il n’en était rien. On représenta à cette princesse que c’était un acte héroïque d’oublier le passé ; que tout scandale serait effacé, quand on verrait Madame tenir à la cour par une place honorable ; et que ce serait une preuve qu’il n’y avait plus que de l’amitié entre le roi et sa favorite. La reine la reçut très-bien ; les dévots se flattèrent d’être protégés par Madame, et chantèrent pendant quelque temps ses louanges.