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La personne questionnée ayant témoigné son embarras, il l’engagea à s’expliquer sincèrement, en lui disant : « Parlez, ne vous gênez pas : c’est positivement l’idée que je veux donner de moi. »

Il est très-sûr que mourant d’une maladie qui fait long-temps prévoir le dernier moment, il écrivit beaucoup, et transmit à son fils, par des notes secrètes, ses affections et ses préventions. C’est bien réellement ce qui empêcha la reine de pouvoir faire rappeler M. de Choiseul à la mort de Louis XV, et ce qui amena M. Du Muy, ami intime du dauphin, à la place de ministre de la guerre[1]. La destruction des jésuites, opérée par

  1. Si l’on en juge par le passage qu’on va lire, personne n’était plus digne que M. Du Muy, de la bienveillance du dauphin et de la confiance que lui accorda Louis XVI, sur la recommandation de son père. De pareils choix, faits par le dauphin, suffiraient pour donner l’idée la plus honorable du caractère et des vertus de ce prince.

    « M. Du Muy était, de tous les ministres de Louis XVI, celui que l’histoire citera avec le plus de louanges. C’était un homme aussi doux de caractère et de mœurs, que ferme et courageux dans ses opinions religieuses et politiques. L’amitié du feu dauphin lui avait donné une réputation de vertu et d’honneur qu’on n’a point oubliée encore. Il avait refusé le ministère sous le règne de Louis XV, mais il accepta celui de la guerre sous son successeur. On le nommait avec raison le Montausier de la cour de Louis XVI, parce qu’il ne s’était jamais départi de ce ton de décence, de probité et de délicatesse dans les procédés qui furent si rares vers la fin du règne antérieur. M. Du Muy répondit à ceux