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d’avoir été page dans la mienne : lisez l’histoire, étudiez celles des peuples et des familles, et soyez à l’avenir plus circonspect dans vos assertions. »


Quelque faible qu’ait été Louis XV, jamais les parlemens n’auraient obtenu son consentement pour la convocation des états-généraux. Je sais, à cet égard, une anecdote que m’ont racontée deux officiers intimes attachés à la maison de ce prince. C’était à l’époque où les remontrances des parlemens, et le refus d’enregistrer des impôts, donnaient de l’inquiétude sur la situation des finances. On en causait un soir au coucher de Louis XV : « Vous verrez, Sire, dit un homme de la cour très-rapproché du roi par sa charge, que tout ceci amènera la nécessité d’assembler les états-généraux. » Le roi sortant à l’instant même du calme habituel de son caractère, et saisissant le courtisan par le bras, lui dit avec vivacité : « Ne répétez jamais ces paroles : je ne suis pas sanguinaire, mais si j’avais un frère et qu’il fût capable d’ouvrir un tel avis, je le sacrifierais dans les vingt-quatre heures à la durée de la monarchie, et à la tranquillité du royaume[1]. »

  1. Un entretien rapporté par madame du Hausset, lettre (F), confirme l’anecdote qu’on vient de lire, en montrant de quel ressentiment Louis XV était animé contre les parlemens.
    (Note de l’édit.)