La manière dont mademoiselle de Romans, maîtresse de Louis XV, et mère de l’abbé de Bourbon, lui fut présentée, mérite, je crois, d’être rapportée. Le roi s’était rendu en grand cortége à Paris, pour y tenir un lit de justice. Passant le long de la terrasse des Tuileries, il remarqua un chevalier de Saint-Louis, vêtu d’un habit de lustrine, assez passé, et une femme d’une assez bonne tournure, tenant sur le parapet de la terrasse une jeune fille d’une beauté éclatante, très-parée, et ayant un fourreau de taffetas couleur de rose. Le roi fut involontairement frappé de l’affectation avec laquelle on le faisait remarquer à cette jeune personne. De retour à Versailles, il appela Le Bel, ministre et confident de ses plaisirs secrets, et lui ordonna de chercher et de trouver dans Paris une jeune personne de douze à treize ans, dont il lui donna le signalement de la manière que je viens de détailler. Le Bel l’assura qu’il ne voyait nul espoir de succès dans une semblable commission. « Pardonnez-moi, lui dit Louis XV ; cette famille doit habiter dans le quartier voisin des Tuileries, du côté du faubourg Saint-Honoré, ou à l’entrée du faubourg Saint-Germain. Ces gens-là vont sûrement à pied, ils n’auront pas fait traverser Paris à la jeune fille dont ils paraissent très-occupés. Ils sont pauvres ; le vêtement de l’enfant était si