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dans les esprits : les états ont écrit à M. de Saint-Florentin qu’il ne serait plus question d’aucune difficulté de leur part ; qu’ils voulaient obéir à tout ce que le roi désirait d’eux, et ne s’occuper plus qu’à lui donner des preuves de leur fidélité, de leur attachement et de leur respect, en sacrifiant leurs biens et leurs vies même pour son service. Ils envoient quatre députés qui doivent arriver demain ; cet heureux changement fait honneur aux sentimens de la noblesse bretonne qui compose la plus grande partie des états.

» On ne peut en même temps refuser à M. le duc d’Aiguillon et à M. l’évêque de Rennes, qui agissent fort de concert, qu’ils ont profité habilement des circonstances et de l’impression qu’elles ont faite sur les esprits. Tout le monde convient que M. d’Aiguillon, depuis qu’il est en Bretagne, s’y conduit avec la plus grande application, et toute l’intelligence et la capacité possibles, tant dans les affaires qui regardent le militaire, que dans celles qui concernent l’intérieur de la province. Sa facilité pour le travail, le temps qu’il y donne, sa politesse lui ont mérité l’estime et l’amitié de toute la Bretagne. (J’écris le dimanche, 9 janvier 1757.)

» Monseigneur le dauphin a donné aujourd’hui une marque de bonté dont la nouvelle sera bien agréable aux Bretons. Il y a un monde prodigieux à son dîner depuis qu’il a commencé à dîner en public. Au milieu de la foule, il a aperçu M. le marquis de Poulpry, homme de condition de Bretagne, qu’il connaît médiocrement, et à qui peut-être il n’avait jamais parlé ; il lui a demandé s’il avait des nouvelles de Bretagne. M. de Poulpry ayant répondu que monseigneur le dauphin devait être instruit : « C’est pour cela que je vous ai appelé, a répondu monseigneur le dauphin, pour vous dire le plaisir avec lequel j’ai appris la conduite des états, que je n’oublierai jamais. Je vous prie de le leur mander. » (Anecdotes du règne de Louis XV pendant la faveur de madame de Pompadour, par Soulavie.)